amazed

Nine n’aime pas faire comme les autres. Il vit selon ses principes, ses envies et les idées qui lui viennent en tête le matin dès qu’il ouvre les yeux.
Et ce matin il fait beau - trop beau pour rester enfermé dans une salle de cours. Il s’ennuie d’avance.

Dans les couloirs, on dirait qu’il déambule sans but précis. Il fait des allers-retours, parfois en sautillant, pivotant sur lui-même, regardant au loin ; son visage s’illumine lorsque Cendrillon apparaît enfin sous ses yeux. Elle passe toujours la serpillère alors qu’elle devrait être au bal. Nine n’a rien d’un prince mais il est venu chercher Aurora. L’inviter à sa petite fête privée qu’il a improvisée dans une clairière reculée de la forêt.

Il sait la convaincre facilement car elle comprend -
Aurora, comme Nine, ne brillent pas de leur étoiles.
Et Aurora, comme Nine, préfèrent les rayons brûlant du soleil.
Alors ensemble, les étincelles sont encore plus flamboyantes.

“Tiens !”

Il te tend le petit rouleau de damiana qu’il a gentiment préparé pour toi.
C’est la seule activité de planifiée pour son bal. Mais puisque tu es l’invitée d'honneur, il faut bien te traiter - il peut au moins faire ça !

“J’avais troooop le seum de pas avoir pu l’utiliser à la soirée de l’été. Je cherchais un moment pour le faire et comme on m’en a filé assez pour deux j’ai pensé à toi - ça doit être lourd de passer le balais tous les jours. Moi ça me rendrait fou.”

Et de savoir qu’à ses vingt ans il terminera probablement au même poste l'horripile un peu.

“Je pense qu’on me forcera à le faire de toute façon.”

Enfin c’est plutôt la simple idée de se conformer encore et toujours pour entrer dans la société qui l’agace.
Nine lèche le papier pour sceller son rouleau. Puis il ricane.

“Au moins on travaillera ensemble ! Je suis sûr qu’on s’amusera bien.”

Il ricane car il se dit qu’il trouvera toujours un moyen pour contourner les routines ennuyantes. Et que des personnes comme Aurora seront toujours prêtes à le suivre.

“Viens.”

Il tend un briquet et l’allume pour que tu t’y penches. La flamme vacille, éclairant discrètement tes joues d’un jaune orangé. C’est une couleur qui te va bien.
Puis il enchaîne en tirant à son tour sur sa cigarette bricolée. Et alors que les fumées s’envolent, Nine profite pour retomber en arrière, s’allongeant dans l’herbe.

Il fait beau aujourd’hui.

“Parce que ça ne sert à rien de fumer tout seul !”

Nine est généreux à ce point lorsqu’il s’agit de partager les interdits.
Il sait très bien s’amuser seul mais ces instants deviennent plus mémorables à plusieurs.
Aujourd’hui il pourra le raconter plus tard -
Il était avec Aurora. Ensemble, ils se sont enfumés d'euphorie. Et leurs éclats de rires se répondaient tel des instruments, fondant des harmonies joviales.
Tout cela, Nine n’aurait pu le faire seul.

“Tu me flattes trop, Aurora.”

Ça donne envie de détrôner le Père Suprême pour t’y laisser la place.
Après tout, les princesses sont héritières.
Et Nine se ferait un plaisir de lui frayer le chemin - toi, tu sauras lui faire des promesses intrépides. Ainsi, il ne touchera jamais à ces balais miteux.

“Seulement la troisième fois ?”

Pendant que tu t'étouffes, il ricane fort - si fort que cela doit même s’entendre au-delà de votre clairière, un plus loin dans les bois.
Il est déjà trop tard - sa main se plaque contre ses lèvres pour atténuer ses moqueries - il n’a pas le droit tu lui dis !

“Pff- mais si tu as accepté c’est que ça ne te déplaît pas.”

Il se calme doucement, son torse vibrant moins par le rythme de ses rictus.
Lui aussi a toussé les premières fois. Il a senti que ça lui brûlait la gorge, que ça lui irritait les poumons, et que son cœur s'accélérait - ça lui manque presque.

“Est-ce que tu t'inquiètes ?”

Il prend une grande inspiration -
La fumée est un léger poison qui sent les épices florales.

“Ça sent bon, tu trouves pas ?”

Personne ne se doutera dans quelles plantes le duo s’est roulé.

“Au pire ils seront jaloux. Ce sera marrant”

Parce que Nine est venu te chercher toi et pas un autre.
Et que vous avez tout abandonné pour prioriser le bonheur.
Vous donnant un air plus malin - on sait comment s'amuser, a compris avant les autres !

Aurora l’a suivie jusqu’ici.
Elle est là pour fumer avec lui.
Alors comme Nine, elle s’allonge dans l’herbe à ses côtés.

Puis Aurora a toujours ces sourires resplendissants. Ils illuminent sans cesse son visage - amusée par la frivolité juvénile. Et même sans se douter qu’ils peuvent aussi cacher les craintes qui animent tes nuits de cauchemars -
Nine les adores ces expressions !
Cela lui donne envie de s’esclaffer encore plus pendant que vous échangez sur tout et rien.

“Je sais que je peux compter sur toi. Si on me demande aussi, je mentirais.”

Sur ce qu’il a fait, avec qui - ce bal auquel il t’as invité est secret !

“J’aimerais te dire que oui ! Que ça ne changerait rien. Mais ce n’est pas avec les étoiles qu’on nous promets que je peux m’amuser - c’est même l’inverse. Donc au final, je suis sûr que je deviendrais comme eux. Et ce serait horrible - je les déteste.”

Pendant que les autres s'inquiètent du nombre d’astres à collecter pour les enfouir dans leurs poches - Nine a fait un trou dans la sienne pour la laisser tomber. Et depuis qu’il a perdu son étoile, il ne s’est jamais senti aussi étincelant.
Il ne voudrait surtout pas perdre cela.

“Comme toi : ils ne me donneront rien. Je ne serais jamais Premium.”

Mais il le dit avec le sourire !
Parce qu’il à confiance en son propre pouvoir (celui du soleil !) - cela lui suffit amplement pour se noyer de bonheur.

“Non je savais pas - tu veux pas aller au Paradis ?”

Lui, il n’attend que ça - partir très loin d’ici.
En se tournant vers toi, il s’est accoudé pour poser sa tête contre sa paume.

“Tu penses que mère ça suffira pour tout changer ? Enfin - tu fais ce que tu veux ! Moi je trouve ça cool comme projet. Mais ça me déprimerait trop de devoir rester ici.”

Il te scrute un court instant.
Juste le temps de tirer sur sa cigarette - le temps d’un silence (ils sont rares).

Nine sourit de nouveau.

“En vrai je t’y vois bien !”

Tu l’affirmes : tu n’iras pas au-delà des portes de l’enclave, car le Paradis ne t’intéresse pas.
Non, ce que tu veux absolument, c’est espérer vivre pour changer ce système pourri jusqu’à la moelle - pour cela tu deviendras Mère - c’est un destin admirable !
Parce que tu auras créé la vie, tu pourras la modeler comme tu le souhaite ; le futur t'appartiendra et en sera plus doux grâce à tes mots.

Aurora est une vraie princesse !
Elle se prépare pour son héritage et devenir reine -
et dans ton royaume, on pensera au peuple.

Nine se penche pour écouter tes secrets.
Il ne réagit pas car il ne faut pas que l’on devine les confidences !

Et cela ne le choque pas car ce n’est pas la première fois qu’il entend ces méfiances.
Ce n’est pas faux - on promet la terre parfaite sans qu’on ne sache à quoi elle ressemble, nourrissant seulement les rêves absurdes d’enfants même lorsqu’il s’agit des plus indomptables.

Nine ne réagit pas, car il ne peut se moquer d’une potentielle vérité (même lui, y à déjà douté de nombreuses fois).
Mais Nine ne réagit pas non plus, car ça le tuerait d’admettre que tu aurais raison.
Il se fiche de l’au-delà - il veut simplement partir.

Du coin de l'œil, il t’observe t’écrouler délicatement entre les herbes.

“Promis, je le dirais à personne.”

Il l’annonce sincèrement.
Aurora mérite de belles amitiés.

“Certain - t’es jolie comme tout.”

Et que dans les contes de fées, tout se finit bien et en beauté.

“Et tu feras une super Mère. Si je peux, je reviendrais - te voir toi et ce que tu auras réussi à changer.”

Lui espère qu’il aura plein d’histoire du monde à te raconter.
Vos ambitions sont folles, et vous y trouvez une complaisance - il croit que ça lui monte un peu à la tête mais cela lui plaît.

“Mais si jamais -”

Il se penche à son tour, te surplombant légèrement, il te fait de l’ombre.
Puis lui aussi se met à chuchoter ce qu’il faut garder pour vous, et vous seulement.

“... Si jamais ça ne marche pas : tu feras quoi ?”

Toi tu ne crois pas au Paradis.
Lui est sceptique à l’idée de voir cet endroit transformé.

Sans se douter qu’un destin aussi tragique t’attends si tes rêves se fracassent, cela te donne simplement un air assuré. Tu sera Mère - aucune autre option n’est envisageable car rien ne te fera autant frémir que de partager ton affection à l’avenir de l’enclave.
Pour toi, l’amour changera tout.

Ta main se frôle à sa joue et tu lui offres ton plus beau sourire.
Nine ne reviendra pas sur ses paroles, tu feras une bonne Mère - c’est ton futur rôle principal et tu comptes rester sur scène. (Et sinon, on tirera les rideaux sur ta tombe.)

Ses lèvres s’étirent pour te rendre la pareille - sa risette est moins cruelle que d’habitude ; sans doute apaisé par la douceur des toxines.

“T’as raison !”

Il retombe à tes côtés, ricanant pour quitter cette lourdeur qu’il a imposé un instant - on est là pour s’amuser ! Puis Nine le premier, ne pense jamais à ces choses trop floues. Il aime ce qui se passe maintenant.

“Enquêteur ? Non je sais pas. Il y a quoi à enquêter ici ? Rien, non ? Les surveillants et les Parents le font déjà assez bien - et les fouineurs aussi ! De toute façon, il n’existe qu’un seul poste ! On aurait jamais pu être ce duo comme dans les vieux livres - genre Sherlock Holmes et Docteur Watson - on aurait pas pu.”

Alors ce poste doit être terriblement ennuyeux !

“Alors que si je suis agent d’entretien, si. Mais peut-être que tu veux juste pas que je travaille avec toi !"

Il fait mine d’être vexé alors qu’il en rigole fort.

“Aurora - c’est méchant ça !”

Et ce que ton rire est contagieux !
Nine rit en écho, ravi de pouvoir partager ces éclats de bonheur avec toi. Il a bien fait de venir t’enlever de ton petit pays peuplé par les serpillères et balais. Certains aimeraient punir son crime, hurler à la mauvaise influence - mais Aurora à l’air tellement plus heureuse lorsqu’elle se laisse emporter dans la frivolité ! C’est pour cela que même si on vous retrouve la main dans le sac, Nine continuera de dérober son amie à la chevelure doré -
c’est bien trop précieux pour la laisser condamnée au triste sort de ce système.

“Ah ça me rassure alors ! Pensons à autre chose…”

D’habitude il ne pense jamais à tous ces futurs post - il n’a pas tant envie de travailler ! Pour lui, tout reviendra au même. Mais il ajoute Aurora et sa bonne humeur, puis il saupoudre le tout des herbes qui montent à la tête - tout devient plus amusant d’un coup !

“Jardinier c’est trop redondant ! Puis faut attendre que tout pousse - non c’est pas marrant. Eh !”

Il te bouscule en retour !
Mais c’est gentil, simple chamaillerie innocente.

“Cuisinier ! Là t’as trouvé le bon plan ! On pourra manger des trucs en douce, et - oui ! Piquer dans la réserve, exactement !”

Lui il volera tout, et toi tu pourras les redistribuer à vos amis !
Et en récompense, vous pourrez organiser un festin rien que pour vous deux. Il s’imagine déjà s’infiltrer dans le réfectoire de nuit, et imiter les Premium avec leur plateaux de rois.

Alors il rigole !
Il rit en se tenant les côtes,
la voix portant d’un éclat sincère -

“Avec moi, toujours ! On est pas là pour pleurer - seules les larmes de joie sont autorisées !”

C’est la seule et unique règle à appliquer au sein de cette clairière.
Il y repense - quelle bonne idée il a eu de fouiller les couloirs pour te retrouver !

“Je veux pas qu’on retourne là bas - c’est trop bien ici. Pas de cours ou de taff - on a juste besoin de rire.”

Le bonheur est trop important,
que c’est triste qu’il soit tant oublié au-delà de la forêt. Et sa cigarette a presque entièrement brûlée.

Non, ce bonheur jamais on vous le volera. Pourtant ils essaient souvent de le confisquer ! Eux, ceux qui prétendent tout savoir de la vie, ils regardent avec assez de mépris pour hurler les menaces, vous taper les doigts et vous mettre au coin en guise de punition -
Mais ce grand bonheur que vous partagez, est bien trop fort pour disparaître pour le plaisir des autres. L’entêtement est l’arme qui vous fait tenir.

Aurora - toi, tu le comprends parfaitement !

Tu le comprends si bien que tu ne dis plus rien un instant,
faisant partie de ces rares personnes qui trouve le raisonnement de Nine suprême ;
il n’a rien d’un idiot ! même qu’il brille mieux que n’importe qui !

Aurora - toi, tu connais la valeur du soleil et de son énergie juvénile.

“Faisons ça - restons cachés ensemble puis on partira quand on veut. On s’en fiche de l’heure - faisons comme si ça n’existait pas !”

Encore une fois c’est la meilleure des idées que tu pouvais avoir - tu as des airs de génie aujourd’hui ! Peut-être que les toxines permettent de développer les capacités intellectuelles - comme il se sent léger !
Nine acquiesce lorsque tu parles de ce festin qu’on ne vous donnera jamais, puis il ricane à ton imitation de Lucien - tu n’es pas comédienne pour rien !

“Pff- il est comme tous les autres Premium, ils ne font jamais de cadeaux pour les gens comme nous. Tu es sa sœur et il n’est même pas sympa avec toi !”

Lui se permet de critiquer car il ne l’aime pas - il le déteste comme tous ceux qui portent les constellations dans leurs mains.

“Tu es trop gentille, il ne mérite pas que tu l’adore comme ça.”

Il a déjà tant en haut de l’échelle alimentaire ! Lui, il ne mérite ni l’amour, ni le bonheur.
Mais Aurora - toi, tu es généreuse comme ça.
Il l’a compris, tu feras une bonne Mère.

Il écrase son mégot contre sa semelle puis la glisse dans sa poche - il ne faut jamais laisser de telles preuves derrière vous - il ne faut pas oublier que ce bal était secret !
Nine se tourne pour se redresser sur ses coudes.

“Ne meurs pas ! T’as faim ? J’ai rien sur moi non - j’ai plus rien dans ma chambre on me confisque toujours tout ! Allons dans la tienne : t’as dit que tu avais de quoi grignoter.”

Nine n’est pas forcément d’accord : il ne pense pas que ton frère - ni ses semblables - mérite ou ait le droit d’amour que tu souhaites tant partager.
C’est, par ailleurs, sans doute égoïste. Il a ces réflexions motivées par la colère des injustices. Il ne cacherait même pas ses sentiments amer - heureusement, il est détendu à cet instant.
L’impression que rien ne pourrait le contrarier,
il veut juste vivre et partager ce petit rayon de soleil avec Aurora.

Tu le prends d’ailleurs dans tes bras.
Pour te soigner toi - c’est ce que tu lui dis.
Mais cela lui allège autant son propre cœur que le tiens : Nine adore les accolades, surtout celles de ses amis. Cela lui apporte cette tendresse dont tu lui parles. Alors naturellement, il te la rend en glissant son bras par-dessus tes épaules, te serrant davantage contre lui.
Et voilà, de cette manière, il sent la rage le quitter un instant.
Comme si son souhait d’oublier ce qu’il se passe au-delà de cette clairière venait de se réaliser.

Mais seulement le temps d’un calin.

Tu te redresses et à son tour alors il t’imite : bondissant presque sur ses pieds ! Le bonheur se retranscrit si facilement au travers de vos gestes euphoriques.

“Je te suis partout - où tu veux - ma chère Aurora !”

Nine vient à tes côtés, bras dessus, bras dessous,
Allons dans ton palais pour découvrir tes denrées - puis continuons la fête !
Il entame le pas, léger.

“J’ai hâte ! C’est même pas bon le réfectoire. Je sais que tu auras mieux.”

Le goût de la nourriture volée, cachée ou parfois simplement offerte,
se savoure mieux que les plateaux trop maigre et fade.

“Bien sûr que je chanterais avec toi ! Même encore mieux que chanter, je vais hurler - faire sonner les notes horriblement fausses - on pourra en rire jusqu’à ne plus sentir nos côtes comme ça !”

Sur le chemin, l’éclat de ses rires résonne déjà entre les feuilles de la forêt.
Nine aime tant jouer les pitres avec toi.