amazed

Entre ces couloirs trop propres, la silhouette de Nine fait presque tâche.
Plutôt qu’une tâche, ce serait presque un parasite finalement.
D’une espèce qui revient régulièrement, faisant comme chez lui sans aucune gêne -
il y aura toujours des personnes pour lui ouvrir avec plaisir !

Mais Love n’a pas ouvert.

Les timings doivent être mauvais - c’est la réflexion qu’il s’est faite.
Et cela aurait pu s’arrêter là : Nine repartant tout simplement au sous-sol car on ne lui a pas répondu. Après tout c’est le soir, il n’y a plus rien à faire à part se préparer pour la nuit.
Mais il a vraiment très envie de voir Love. Il apparaît si souvent au fil des conversations qu’il est devenu curieux. Comme s’il était partout. Lui aussi est peut-être une autre espèce de parasite -
Nine n’en sait rien, ils n’ont jamais réellement échangé mis à part quelques regards au détour d’une allée.

Accroupi contre le mur à côté de la porte de ta chambre, il attend avec impatience ta venue. Il adresse même des sourires innocents envers les autres blocards qu’il aurait pu croiser ici : le couvre-feu n’est pas encore passé et il ne fait rien de mal !

“Love !”

Alors quand c’est enfin ta petite tête blonde qui apparaît au bout du couloir, il se redresse, faisant un grand signe de la main pour t'accueillir au loin, sincèrement enjoué à l’idée de te parler,
enfin.

“Je t’attendais.”

Il glisse même légèrement contre ta porte pour t’empêcher d’y entrer.
On ne sait jamais.

“Est-ce que tu prévois d’aller dormir ? Ça fait suuuper longtemps que je suis là, tu sais ? J’avais peur de te louper. Mais il me reste encore un peu de temps ! Au pire ça dépassera, c’est pas grave.”

Il passe l’étape des salutations, des présentations - de tout ce qui est générique est ennuyeux - cela n’intéresse personne et surtout pas Nine. Il enchaîne, ne laissant pas forcément le choix :

“Dis, elle était super votre dernière chanson au concert l’autre soir.”

C’est faux puisqu’il n’était pas là.

“Mielle m’as dit que c’était pour elle - c’est vrai ? En tout cas, elle avait l’air contente.”

Elle lui a raconté plus tôt.
Tu étais encore là, existant au travers de ses mots.
A force il voulait te voir, écouter tes mots à toi.

“Tu l’aimes encore ?”

Il demande, avec ce sourire narquois aux lèvres.
Nine cherche vraiment à comprendre pourquoi tu es partout !

“Un peu des deux.”

Il a ses idées en tête et change rarement ses plans si rien d'autre n’accapare son attention entre temps. En l'occurrence, il se passe peu de choses intéressantes dans les couloirs.

“Oui je savais. C’est pour ça que je me demandais ! Je pensais que tu lui en voudrais. Il est sympa ton feeling avec elle - tu lui dédicace des chansons, la chance !”

Il ricane, s’en moque un peu.
Lorsqu’on lui a raconté, il a trouvé la scène absurde. Alors il regrette presque d'avoir raté le concert. Il aurait pu voir si tu étais si hypnotisant qu’on le dit sous les feux du projecteur. Et il aurait pu entendre ce qui rendait cette chanson si envoûtante pour avoir reçu tant de compliments.

“Non pas du tout. Pourquoi tu demandes ça ?”

Sa tête se penche légèrement sur le côté.

“Ça te gêne que je parle d’elle ? On peut parler d’autres choses si tu veux. En vrai je m’en fous de si tu la kiffe ou pas.”

Quand il t’attendait, Nine n’avait rien d’autre à faire que réfléchir à votre discussion. Et naturellement le sujet de Mielle lui est venu en tête : elle vous concerne de près ou de loin, cela faisait un bon prétexte.
Enfin c’est pas grave - il trouvera bien autre chose.

“On a pas mal d’amis en commun - Love, je l'entend beaucoup ton prénom ! Donc je me disais qu’on pourrait bien s’entendre.”

Dans les récits qu’on lui a raconté, et la manière dont il a imaginé ta personne, il s’attendait à ce que tu sois plus intense dans ta lumière pour réussir à t'immiscer un peu partout.
Puis tu es un voleur. Tes mains ne peuvent pas s’empêcher de dérober les battements de cœur - mais on dirait que tu n’en fais rien !

“... Mais je me trompe peut-être ?”

Son sourire s'affaisse pendant que son regard dévie ailleurs. Observant le bout du couloir, il se tâte déjà à repartir. Il s'ennuie toujours très vite.

Il guette tout de même ta réaction du coin de l'œil. Car il se demande si tu fais partie de ces profils qui présentent assez d’assurance pour rire avec lui.
Ou au contraire, ceux que l’on ébranle facilement après un mauvais rictus -
Après tout, les larmes tracent les paupières de rouge.

Son pied aura eu le temps seulement de pivoter pour initier un départ Mais Love le contredit - et plus encore ! Il le retient, attrapant son bras pour l’emmener dans sa chambre.
Cela le surprend assez pour qu’il se mette à rire fort, l’éclat hante les couloirs jusqu’à ce que la porte se referme - les murs étouffent assez les voix, rendant ainsi les discussions tout de suite plus intimes.

La preuve ! Tu vas droit au but, décelant immédiatement les intentions de Nine.

“Quelle perspicacité !”

Ses épaules tremblent encore doucement par les rictus.
Il sent qu’il peut bien s’amuser avec toi, alors son sourire ne cesse de s’élargir jusqu’aux oreilles. Jusqu’à ce que l’expression lui fend le visage en deux -
Contrairement à Love qui sait offrir le charme, Nine devient vite troublant.

“Et donc ?”

Il fait un tour sur lui-même, observant rapidement ta chambre pour voir ce que tes possessions racontent de toi.
Nine ne se retourne qu'à moitié : te faisant encore dos, il présente son visage de profil seulement. (Il en faut plus pour avoir toute son attention !)

“A qui j’ai affaire ?”

S’il n’y a plus besoin de s’éparpiller pour trouver des réponses entre les non-dits -

“T’entends quoi par mieux que ça ?”

Arrêtons d’être subtil !
Plus besoin de mentir entre ces murs - faisions comme si les secrets n'existaient plus.

Et Nine s’amuse d’attraper toutes sortes d'insectes dans sa toile ! Ainsi il peut tisser des liens -
il s’amuse avec en les forçant dans ses pièges,
parfois pour les empoisonner,
parfois les dévorer -
ou simplement les laisser de côté !

Mais rien n’est jamais décidé à l’avance - cela dépend toujours qui il croisera en premier sur son chemin : Love n’est même encore pas grimpé sur sa toile !
Cette réticence aurait pu le vexer si tout ne rimait pas à un jeu pour lui - celui-là est juste un peu plus compliqué que les autres.

“C’est trop-”

d’honneur - mais tu le coupes !

Nine se précipite pour plaquer sa main contre tes lèvres, te tirant ainsi en arrière contre lui. Puis de son autre main, il claque la porte.
Il y a eu un court instant de flottement - encore surpris de ton geste - avant qu’il se mette de nouveau à pouffer un rire.

“C’est pas sympa ! Tu veux m’attirer des problèmes ? ‘Fin de toute façon j’ai croisé plein de gens déjà quand je t’attendais - ils ont l’habitude de me voir ici : il n’y a pas que toi que je viens voir à cet étage.”

Tu vois, tu n’es pas si spécial !

“Est-ce que tu m’as menti ? Tu veux pas qu’on devienne amis ? Pourquoi tu m'as retenu alors ? Je serais parti là - tu l’as fait exprès ? Dis-moi à quoi tu joues. J’aime bien jouer, tu sais - faut juste m’expliquer les règles.”

Alors qu’il t'inonde de questions, il te retient encore. Tu ne peux même pas lui répondre, et lui s’aventure dans les risques des rapprochements interdits.

“Tu comptes me dire ? Hoche la tête si oui - je te lâcherai.”

En réalité ta capacité l’intrigue - il se demande jusqu'où il faudrait aller pour se sentir mourir.
Actuellement, il se sent encore bien.
Juste très légèrement affaibli.

“Et si tu recommences je m’en vais. J’aime pas les balances.”

Lorsqu’il retire sa main, il n’a même pas besoin de reculer pour te laisser de l’espace car tu t'enfuis tout seul.
Et ceux qui prennent la fuite,
qui se retrouvent piégés au pied d’un mur,
qui dévient leur regard fébrile ; ça l’amuse !

Cela lui arrache un énième sourire.
Lui aussi à réussi à te surprendre !

Pourtant c’était évident : tu portes toujours des gants - tu ne touches personne et personne n’ose te toucher peau dévoilée.

“Bien sûr que si.”

Nine s’avance vers toi, se penche pour intercepter ton regard - il te montre sa main.

“Regarde.”

Elle tremble légèrement - se rythmant par ces spasmes liés aux efforts lourds et la fatigue.
Il l’a senti après-coup, sûrement camouflé par son adrénaline.

“Mais c’est pas imminent à ce que je sache, non ? Tu vois - à part ça - je vais bien là.”

Et c’est parce qu’il en connaît les conséquences qu’il n’a pas hésité. Il reste adepte des prises de risques - Nine se dit qu’il ne peut rien regretter lorsqu’il s’agit des émotions intensifiées.
Le sentiment de perdre vie en fait parti -
à la limite d’un avant dernier souffle.

“Cool ? T’es un peu bizarre.”

Après tout, personne n’aime vraiment être retenu de la sorte.
Il a déjà fait pleurer des blocards comme ça - on lui a jamais dit qu’il était cool.
Ce sont des réactions nouvelles qu’il observe -
Nine ne cesse de sourire !

“Remarque moi aussi j’ai trouvé ça marrant.”

Ou cool - comme tu préfères.

Sa main se relève vers ton visage. Il s’en approche sans te toucher, ses doigts frôlant à peine ta joue -
il fait semblant d’être précautionneux alors qu’il adore jouer avec les flammes.

“Ton pouvoir il fout la frousse - c’est ça qui est marrant. Moi j'aime bien.”

Il trouve une certaine satisfaction dans les réactions et les mots de Love :
Il voit qu’il hésite, qu’il n’ose pas les accidents.
Parce qu’il à peur, s’éloignant pour se figer dans les recoins.
Mais son regard brille d’envie ; cela devient un besoin - un manque monstrueux même -
Nine est ravi de voir tout ceci se manifester devant lui. Que c’est lui également qui l’a provoqué. Et qu’il peut même continuer à se plonger dans ces limites !

“Ce serait mal me connaître.”

Mais il te pardonne. C’est la première fois que vous jouez ensemble - il est normal de ne pas tout savoir de son coéquipier - lui aussi te découvre.

Sa paume vient se coller à ta joue, ses doigts glissant contre l’épiderme mortelle.
Pourtant lorsqu’on parcours les traits de ton visage, tu es quelqu’un de tout à fait banal ; ta peau est douce, brûlante aussi par ferveur -
C’est ce qui rend cette malédiction d’autant plus redoutable !

“Tu trouves pas ça marrant, toi ?”

Condamné à être isolé des caresses.

“Je peux pas croire que personne n’a osé te toucher - même juste pour voir.”

Lui le fait juste pour voir ;
Il constate que ses veines ressortent, contaminant au fur et à mesure son avant bras et cela le crispe malgré lui. Ses doigts s’accrochent, tremblant -
son autre main se plaque de l’autre côté, enveloppant ainsi entièrement ton visage - tu lui aspire de la vie mais il y tient fort - très fort et plus que tout au monde !

“Alors que c’est super excitant de frôler à ce point la mort. Et sauf qu’au lieu de se suspendre au-dessus du vide, suffit de te prendre dans les bras.”

Ton existence elle-même devient un défi et incite sa tentation à l’extrême.
Ses pupilles se dilatent, son souffle se fait plus court et son cœur bourdonne dans ses oreilles - il approche son visage du tiens, te regardant droit dans les yeux. (De ses doigts engourdis, il a du mal à mesurer la force qu'il y met.)

“Est-ce que t’as peur ? Moi oui - j’ai jamais ressenti ça avant.”

Une peur aussi intensive.
Celle qui se lie à la fin.

La peur c’est ce qui le nourrit le mieux. Il la cherche tout le temps, sous toutes ses formes et il espère chaque seconde trouver l’élément qui lui fera sauter un battement -
cela comble son intensité,
qu’il en devient meilleur,
et encore plus fort !

Nine ricane - sa voix se fond entre ses respirations haletante,
il se rapproche doucement d’une terrible fatalité qui le fait palpiter.

“C’est que t’es capricieux en plus..!”

Pendant qu’il se met en danger tu en réclame plus - et encore plus !
Seulement parce que tu ne connais aucunement tes propres limites, tu peux les imposer égoïstement jusqu’à ce qu’on te rejette. Il t’imagine déjà pleurer, regrettant les accidents de ta destruction - mais il raffole aussi des larmes !

Ainsi, il te lâche le visage, enroulant ses bras jusque dans ton dos ; sa tête repose contre ton épaule. Nine soupire fort - râle presque - de cette étrange souffrance qui se manifeste par la soudaine violence des symptômes.

“Je suis fatigué.”

Il sent que ça commence à l’étourdir, alors son poids commence doucement à se reposer contre toi.
Et puisqu'il ne flanche pas,
Il ne te lâche pas !

“Mais ça va-”

Et il sert même très fort,
car il le peut encore !

“... Tu penses que je vais m’évanouir ?”

(Ou pire ?)

“Faut pas - je pourrais pas te voir en panique sinon…”

Il ne peut rater aucune de tes réactions - elles sont bien trop inédites.

Love fond en douceur au creux de sa nuque. Il sent les souffles pétrifiés s’apaiser avec les folies fiévreuses - tu le retiens, l’encourageant à sombrer dans l’intensité de ses propres vices.
Tu lui voles les battements de son cœur.

Nine ne saurait dire combien de temps l’étreinte à durée, mais les secondes semblent se dilater lorsqu’on se sent s’éteindre- ses émotions sont virulentes, sa douleur passionnelle, son euphorie terriblement excessive ;
Nine en voudrait plus,
tenir encore plus,
oublier comment respirer -

Mais voilà ! La réalité c’est que les spasmes s’aggravent, que son souffle se coupe brutalement, il perd pied !
Love le rejette - il n’a plus assez de force pour trouver une accroche, il dégringole à ses pieds.
Et il lui faut un instant pour revenir, reprendre doucement ses inspirations, retrouver l’équilibre avec son corps engourdi ; il porte une main à son torse, sentir son coeur tambouriner à une vitesse folle - il pouffe de rire.

“... Je sais pas ?”

Va savoir !
Il relève la tête pour te regarder mais titube en arrière, la vision encore légèrement embuée - ses yeux sont écarquillés. Et en faisant appui sur ses bras, il les sent encore fragiles.
Ce manque de contrôle le rend hilare - Nine explose de rire !
(Peut-être que c'est le sang qui lui monte à la tête.)

Il repense à toute l'absurdité de cette première rencontre ; rien ne fait sens et c’est cela qui la rend d’autant plus surprenante - la sensation que tu lui a donnée, il s’en souviendra éternellement.
Dans le vertige de sa folie, il se laisse même tomber en arrière - aucun répit pour ses poumons ! Ses rictus ne veulent cesser, il s’en tient les côtes.

"C’était trop bien !”

Il annonce dans sa frénésie tordue par les sourires.
Nine se redresse d’un coup, il est assis en tailleur.

“Tu crois que c’est mon pouvoir ? Je te jure j’ai cru que j’allais crever, ça m’a trop stressé - mais ça me rend meilleur ! Plus fort ! J’ai tellement utilisé d’adrénaline là - je suis épuisé !”

Et malgré la fatigue, l’excitation d’une telle découverte fait pétiller ses pupilles et ses réflexions fusent à toute vitesse - il se demande déjà à quoi vous pourrez jouer plus tard !

La fascination est réciproque et Nine ne te quitte pas du regard. Il scrute chacun de tes mouvements fébriles comme tes expressions brûlantes d’émotions ; cela le rend dingue !
Il pourrait en devenir déraisonnable - se perdre plus loin encore dans ses lubies enflammées qui stimulent son coeur.

Nine le sent
malade intensif, ses joues chauffent -
son ardeur le fait vibrer !

Tu t’approches et son sourire s’étire en sentant les fourmillements sur son genoux.
Ses yeux - complètement dilatés - restent plongés dans les tiens alors qu’il glisse sa main pour t’attraper les doigts.

“Une autre fois ? Je vais finir par penser que tu veux juste me tuer sinon.”

Ainsi il t’arrête, retirant ta main.
Mais sans te lâcher pour autant : son pouce caresse ta paume - elle est gantée alors il ne risque plus rien.

“Si on prend notre temps, on pourra aller plus loin.”

Tu connais la limite des autres mais lui veut découvrir la tienne.
C’est trop simple de réclamer en fonction de tes désirs puis pleurer lorsque les autres s’écroulent. Lui aussi peut décider ce qu’il veut.

Il finit par rompre le contact et se lève. Il a même légèrement chaviré, encore dans les vapes d’une fatigue intense - il a un peu l’impression d’être sous poison et cela le fait rire.

“Je reviendrais. Promis.”

Il promet (ce qui est rare !) en ébouriffant tes cheveux.

Cela lui crève presque le coeur - Nine est un enfant roi qui aime tout réclamer dans l’immédiat - il veut tout faire, tout voir et tout utiliser jusque dans l’excès au point que les choses finissent brisées ; puis il se lasse. Il se lasse cruellement.
Love est un nouveau jouet alors il veut en profiter ! Il veut réussir à l’aimer le temps qu’il faudra.