amazed

night is crawling up to the day

ça tambourine à ma porte d’un coup et c’est pas une heure pour recevoir de la visite. je pourrai râler en prétextant que c’est la nuit et que je dors mais c’est faux. j’dors pas dans cette chambre miteuse au mur humide et au matelas trop dur. si y’a un truc que je regrette du 1er étage c’est bien le confort de cette foutue chambre.

je me lève du lit, un peu contente qu’on vienne me tirer de mon ennui. quitte à pas dormir autant que ce soit en bonne compagnie. je sais direct qui s’cache derrière la porte parce que y’a qu’une personne dans toute cette enclave peut débarquer à cette heure là et en tapant comme ça: ena.

“yo miss. bienvenue dans mon palais, fait comme chez toi !”

j’le dis en rigolant, j’ai la voix un peu fatiguée parce que bon ça fait une paye que le soleil s’est couché alors qu’on est en été. je tire la révérence alors qu’ena rentre en lui présentant mon humble demeure. ena elle a zéro étoile comme moi donc on a basiquement la même chambre, à l’orientation du lit près.

“ouais ça va tranquille, j’dors juste pas mais comme d’habitude… je pense que c’est parce que je suis trop intelligente tu vois ? ça tourne là dedans et du coup, bim, insomnie.” ça me semble évident que ça fonctionne comme ça. je laisse ena s’installer sur le lit et j’me laisse tomber par terre sur le sol. j’utilise mes pulls en guise de tapis pour un peu plus de confort. “tu veux fumer ? j’ai des restes de valériane et de damiana.”

quitte à pas dormir autant y aller à fond. en plus avec l’absence de fenêtre dans la chambre crée un effet sauna dès qu’il y a de la fumée. ça fait trois fois plus d’effet.

“oui bordel j’ai vu !!! putain meuf merci d’avoir réagit je comprends pas pourquoi personne n’est choqué dans cette foutue maison ?” entre l’indifférence et le pardon, il n’y a pas eu une personne à part ena pour s’indigner. “je te jure que je ne comprends pas comment elle a pu faire ça ? je suis tellement choquée ???”

en vrai, plus tant que ça. j'étais sidérée de colère en découvrant les messages sur la conversation de groupe, puis ça a vite laissé sa place à l'effroi. ça m'a juste rappelle à quel point tout le monde était fucked up dans cette foutue en enclave.

night is crawling up to the day

je me fend de rire en deux alors qu’elle tacle jim parce que c’est ce que j’aime bien avec ena: elle dit tout haut ce que je pense tout bas. du coup je peux me lâcher et je culpabilise pas. “hahaha purée t’as grave raison.. ou alors il est constamment complètement déchiré et c’est pour ça qu’il est autant à côté de ses pompes.” je ricane tandis que mes petits doigts s'activent sur les feuilles à rouler. j’y verse un peu de valériane pour commencer puis je me dis que ça serait une pure idée de mélanger ça avec de la damania pour amplifier l’effet, le tout dans du thé pour pas consommer de tabac: c’est mauvais pour la santé.

“une fois il m’a confisqué un pochon je suis sûre qu’il l’a fumé derrière le boug !”

j’hoche la tête, ena me confirme que mélanger les deux plantes c’est l’idée du siècle. au pire je dors, au mieux on est déchiré. dans les deux cas on sera assommée alors autant en profiter.

“ouais déso’ j’ai pas répondu j’ai oublié.” ena connais ma propension à juste ghoster. “non mais meuf je suis TOTALEMENT d’accord ! tu dis les termes !”

je m’active un peu et je fais des grands mouvements dans mes gestes parce que bordel: enfin quelqu’un qui le reconnaît. “c’est SÛR meuf, c’est sûr que si ça avait été toi ou moi on se serait bien fait engueuler et adieu les étoiles !”  bon techniquement on en a déjà plus donc compliqué d’en perdre. “elle est grave privilégiée c’est un truc de fou. et puis même t’as vu sa punition ?? elle doit s’occuper d’un chat ça me rend fou !”

à force de bouger et de m’exciter j’ai failli tout faire tomber heureusement c’est bon le joint est prêt. ena tire une latte en première parce que c’est mon invité et je ricane quand je la vois tirer. c’est à mon tour maintenant j’inspire un bon coup et je laisse la fumée s’infiltrer dans mes poumons.

“non mais laisse tomber ils sont tous tarés. entre la secte du club de méditation , les mégalos du club de théâtre et ceux qui pensent tout savoir au club de débat… j’en peux plus de cette maison.”

non vraiment y’a rien qui va. je crois que je suis quand même un peu jalouse parce que moi j’ai jamais tué un chat et pourtant on m’a ôté mon étoile on m’a foutue dans ces dortoirs miteux on m’a collé les mains dans la terre.
moi aussi j’aimerai bien avoir un chat et la tendresse du père.

night is crawling up to the day

je me mets à rire à gorge déployée. c’est bruyant et maladroit parce que je suis comme ça: je ris fort, en mouvement, je crève le silence de mon corps et de ma voix et tant pis si ça plaît pas “j’te jure. après j’ai du mal avec les parents hein, je te fais pas de dessin... mais jim… j’pense faudrait aller le secouer un peu, ou lui mettre une claque, je sais pas…” on dirait que jim s’est pas réveillé d’une trop longue sieste. j’aime aucun parents; y’a que pierrot qui est un peu marrante.

“nan mais ils se donnent vraiment tous des airs ? en mode ils ont compris les trucs essentiels de la vie, et gnagnagna on est mystérieux et gnagnagna on est trop intelligents… eh gros c’est bon !”

ils ont rien compris en vrai de vrai. s’ils avaient tout compris ils seraient heureux. or ils ne le sont pas. on ne peut pas être heureux quand on assassine un chat.

“oh si, je te lance, ena.” je lui sourit en lui rendant le joint. moi j’aime quand elle se lance dans ses scandales et qu’elle me démontre par a+b à quel point tout est fucked up. quand elle a fini, c’est toujours pareil: je suis d’accord avec elle. j’hoche la tête devant sa conclusion, je ricane au tacle sur la chambre. “pauvre trois étoiles et premium qui ont une chambre si grande qu’ils se sentent seuls… eh, s’il y a que ça, j’viens dormir avec eux et faire l’animation hein !”

je soupire mais j’ai une idée. faudrait que je propose à dani et love un concert surprise au troisième et à l’étage des premium. mais genre, à une heure random, genre 1h du matin quand messiers et mesdames roupillent bien.

“t’aimerai avoir un chat, toi, ena ?”

moi oui. ou un chien. mais plutôt un chat je crois. j’en aurai jamais mais ça m’empêche pas de rêver.

“bahahaha !!! ouais on arrive et on sort une question conne genre: l’oeuf ou la poule ? et on les regardes débattre à fond en mode big brain. y’en a un qui va nous sortir “l’oeuf parce que y’avait des dinosaures avant les poules” ou un truc comme ça je sais pas j’écoutais pas en cours de bio…”

je sais pas ce que j’raconte mais l’idée de débarquer dans leur club pour raconter des trucs aléatoire et leur faire un choc mental, ça me plaît. je reprends le joint pour finir de tirer dessus et je me fend d’un sourire. “alors, c’est comment ? tu commences à planer ?” c’est une question à but purement scientifique, bien sûr ! c’est pour voir si je peux commercialiser le mélange valériane damania et si ça fait pas trop de dégât.

night is crawling up to the day

j’éclate de rire tandis qu’ena me fascine avant de lui lever le majeur en une grimace amicale. “tu l’auras pas, ton dessin !” je réfléchis à l’idée de voir jim dans la panic!room. ça serait vraiment drôle avec sa sale tronche de vieux con impassible. “moi j’pense sa phobie c’est d’avoir des émotions.” c’est forcément ça, vu comment il en a jamais.

“aaaah j’aime bien quand tu dis les termes, ena ! mais tu sais quoi, eux ils ont la richesse… euh pardon, ils sont appréciés de wicked, mais nous on a quelque chose de beaucoup plus précieux qu’eux.”

j’la fixe un instant pour faire monter le suspens, maintenir mon effet.

“l’bonheur !” j’pointe le plafond de mon index comme si le concept du bonheur était écrit là-dessus. alors qu’en vrai, y’a juste une vieille lampe qui grésille. même pas d’abat-jour. ”tu crois qu’ils sont heureux eux ? avec leur esprit torturé de gens qui pensent trop ? nan. on peut pas être heureux ET aller dans un club de méditation de manière SÉRIEUSE. soyons pas fou.”

j’insiste bien sur les mots parce que vraiment, le concept de club de méditation me flingue. ceci dit, j’me demande si ça serait pas pile le bon public pour mon petit business.

“hmm… je vois.” j’expire de la fumée. passer son temps au social club, ça m’semble être un beau rêve. même si en vrai, non, j’troquerai pour rien au monde l’air frais des plaines. “tkt on a qu’a monter un looser club avec dani et la clique, et voilà ! bim ! contre soirée !”

le plan de fou. ça marchera jamais mais en vrai, quand on traîne en bande, est-ce que c’est pas déjà un peu le cas ? moi je me dis que si notre existence suffit à leur faire froncer les sourcils, c’est déjà une petite victoire !

“mais tu sais ena ! les dinosaures là, les gros lézards trop fort comme godzilla qui crachaient du feu ! c’est des reptiles donc ils pondent des oeufs ! donc entre l’oeuf ou la poule, ben c’est l’oeuf, tu m’suis ?”

pas trop sûre que les dinosaures crachaient vraiment du feu mais je commence à être défoncée.

“arrêeeeeete, c’était la meilleure idée !” je ris encore, le joint est quasi fini alors je lui rends pour qu’elle profite. “bahahaha… en parlant de coq, si tu d’vais associer un animal à un blocard, ça serait qui le coq pour toi ?”

moi j’ai plein d'idées en vrai. genre… luke. ou ashkat. ouais, ashkat c’est vraiment pas mal !

night is crawling up to the day

je ris encore. l'imitation du club de méditation vu par ena ne manque pas de charme. je la regarde d'un air un peu espiègle, je viens la bousculer de l'épaule de la main pour la chambrer un peu, toujours en riant. "meuf, tu les imites trop bien ! en vrai songe à t'inscrire au club de théâtre pour leur faire grâce de ton talent…" je mime une courbette devant sa majesté. j'imagine la représentation intitulée "voyage au club de méditation" et ça me fait marrer. serait-ce un épopée ou une comédie ? sûrement une tragédie. un truc du genre: mince, à force de réfléchir, robin est devenue folle et à tuer un chat !

mon sourire s'efface doucement. repenser au pauvre pickle me fout un coup de blues. je ne sais pas si c'est accentuée par la fumette mais j'ai soudain les yeux dans l'vide. je secoue la tête pour chasser toutes ces histoires sombre de ma cervelle. il faut laisser ce qui nous rend triste sur le pallier. on a pas le temps de se prendre la tête avec ça. "bon viens, on arrête de parler de ces loosers." ça m'évitera de déprimer à mon tour.

"ha ha ha ! j'te savais pas si attachée aux apparences, ena !" je m'esclave pour chasser définitivement toute once de tristesse en ma personne. moi, je m'en fiche qu'on me prenne pour une looseuse; je m'en fiche qu'on me prenne pour quoique ce soit, à vrai dire. je sais qui je suis et je n'ai rien à prouver au monde. de toute manière, cela n'intéresse personne. "mais ok, va pour la clique des cools kids."

la conversation n'a plus aucun sens et je ne peux m'empêcher de continuer de me marrer. alors je me relève pour récupérer la fin du joint, mais il n'y a déjà plus rien alors je crapote et ça m'fait tousser. je ris encore, de moi, cette fois. puis je viens m'effondrer sur le lit au côté d'ena, sur mon lit. je me love contre elle dans une position peu agréable, mais ce n'est pas grave. à cet instant: rien n'est grave.

"nine… t'sais que c'était mon meilleur pote avant ?" je relève la tête vers elle. mon sourire est un peu plus triste. "nine peut pas être un coq, il a pas d'étoile et pas l'arrogance de ceux qui en ont plus de trois. nan, un coq ça reste juste un gros volatile. c'est fier mais ça crie plus fort que ça ne mord. et nine... nine c'est plutôt un crocodile." nine il mord vraiment. il n'a pas besoin d'un titre pour prétendre être ce qu'il est. "ok vas-y je te dis trois noms et tu me dis qui est l'œuf, le dinosaure ou la poule…" je réfléchis, mais mon esprit est embrumé. "kafka... césar et… le père suprême !"

je ris, l'air un peu navré: j'ai pas trop d'inspi. je sens mes yeux qui commence à se ferme. le joint est éteint alors je le jette au sol - en prenant soin de vérifier qu'il n'y ait plus aucune braise - je le ramasserai demain. je reviens coller ma tête contre ena, entourant mes bras de son corps. "j'ai sommeil…" il serait peut-être temps de songer à s'endormir.