amazed

De sa blessure, ne restent que les taches rouges du sang sec. Luke a repassé son t-shirt poisseux, n'est même pas passé par sa chambre. La nuit est bien avancée, mais il ne ressent pas le besoin de se coucher Luke, encore moins de se calmer. Il ne le pourra pas tant qu'il ne l'aura pas vu.

C'est lui. C'est forcément lui.

Que ce soit conscient ou pas, n'a que peu d'importance. Alfie a désormais le pouvoir de le nuire et Luke est furieux. Furieux qu'on lui ai imposé la peur, furieux d'être désormais pleinement conscient des fissures qui lézardent sur sa statue de marbre. Et que la vérité soit incertaine lui importe peu. Luke a pris tous les indices et en a fait des preuves. Luke a pris les hypothèses pour en faire des faits. Là, c'est la colère, la tension qui parle. Au fond de lui résonne la voix de Kafka.

Toi aussi, tu l'aimes.

Et Pablo à bu son sang.

Et Judas n'est plus là pour pacifier quoi que ce soit.

Alors Luke n'a plus aucun garde fou, aucune raison d'être calme.

Il descend les marches jusqu'au sous sol lieu où, il s'en compte, il n'a jamais mis les pieds avant. Les couloirs sont froids et austères. Luke leur trouve quelque chose de lugubre, d'insalubre. Alors c'est là que dors Alfie maintenant ? Merde, la culpabilité ne l'apaise pas, au contraire.

Il se plante devant sa porte toc avec force trois fois. Quand la porte s'ouvre, Luke rentre en forçant le passage avant de claquer la porte derrière lui.

C'est toi. C'est toi qui a bloqué mon pouvoir. Comment pourquoi j'en sais foutre rien mais ça vient de toi.

Un sourire désabusé passe sur son visage, il a le cœur qui bat, il n'a jamais battu aussi vite et douloureusement.

Toi aussi, tu l'aimes

Des conneries, des putains de conneries.

Tu me détestes à ce point ? C'est ce que tu veux vraiment au fond de toi ? Whoua.

Je te déteste, ouais

Ça pique. Ça brûle. Pendant un bref instant, Luke reste sans mot. Ça ne devrait pas être aussi dure à encaisser, pourtant ça l'est. Ses sourcils se froncent, l'information lui déplaît pourtant il ne peut la reconnaître que comme étant logique. Mais si le choc le clou sur place une seconde, le reste le remet en marche tout aussi rapidement.

Putain je savais que t'étais débile mais pas à ce point. Je viens de te dire que t'as débloqué un nouveau pouvoir crétin !

Luke serre le poing. C'est pas fou, mais c'est rare. Qu'Alfie puisse posséder une telle particularité l'énerve. Un sans étoile ne devrait pas être aussi puissant. Ça devrait être lui, ça devrait être pour père. Une ancienne croyance voulait que le second pouvoir soit une récompense céleste, accordée aux plus méritants, à ceux qui avaient suffisamment fait pour la communauté. Il ne sait plus vraiment d'où ça lui vient. Peut-être d'une maman de la nurserie à l'heure des histoires du soir. Ce n'est pas vraiment un fait, mais Luke avait aimé cette fable lorsqu'il était enfant. Et quand bien même aucun dieu, aucune entité, n'étaient à l'origine de leur don, voir Alfie développer ce que lui n'avait pas le rendait jaloux au possible. Ce n'était pas juste. Pas logique. Encore une fois, les lois pourtant impénétrables de l'enclave se retrouvent malmenées par les faits. À croire que le système est mensonger. L'idée, le terrifie. Alfie ne pouvait pas être meilleur que lui.

Robin l'a sentie, mon pouvoir s'est réactivé dès que tu t'es éloigné de moi. Ça crève les yeux.

Non, Alfie ne pouvait pas être meilleur que lui. Pas après avoir été aussi bête, avoir fait aussi mal.

Tu l'aimes, toi aussi.

Pas après lui avoir brisé un cœur qu'il n'avait même pas eu conscience de lui donner.

C'est risible, comment l'amour est une putain de gangrène. C'est risible que personne ne s'en rendent compte. C'est risible que dans les gestes de Luke, il n'y a que l'urgence, la colère. Le premium pointe un doigt accusateur contre le torse d'Alfie, ne se rend pas compte de la proximité de leur lèvre quand il gronde.

Pour une raison que j'ignore tu m'as empêché de me régénérer et .. Je te crois. Je te crois quand tu dis que tu essayais de m'aider. Mais qu'on soit bien clair, si demain on te diagnostique un second pouvoir et que tu l'utilises cette fois-ci sciemment contre moi, je ne retiendrais plus mes coups, Alfie. Ne fais pas revivre ce que j'ai vécu là-bas.

Des fois, il suffit juste d'un mot. Luke est grand. Luke est frère. Luke n'est rien qu'un gosse auquel on a appris que l'insécurité régissait sa vie.

Il y a une époque pas si lointaine où il n'aurait pas craint la grandeur d'Alfie. Il s'y serait réfugié, l'aurait aimé, faite grandir. Parce qu'Alfie était incroyablement beau dans la réussite et que Luke ne savait pas le quitter des yeux. Mais quand il regarde son ex-meilleur ami, ce soir, c'est le père qu'il voit. C'est sa voix aux accents un peu chantant qui vient lui dire Alfie à débloqué un second pouvoir ?. C'est le résultat des votes, le timbre déçu dans sa voix Tu as mal sauté, toi ?. Son front s'échoue avec violence contre celui du sans étoile, ses mains agrippe le col de son t-shirt avec force. Il n'a qu'une vague conscience d'à quel point la proximité de leur corps le rassure, de comment la colère qu'il lui crache lui fait du bien. Ils n'ont jamais existé autant ensemble que dans ces moments là.

Ferme ta gueule ! Je suis meilleure que toi, à tous les niveaux !

Répète les mêmes injonctions, parce qu'il faut bien qu'il comprenne, Alfie, que ça lui rentre dans le crâne.

Te faut bien le vote de tes potos sans étoiles et la pitié de Robin pour te donner l'illusion que tu vaux mieux que moi.

Il appuie un peu plus, son torse se soulève à mesure qu'il enchaîne.

T'aurais été incapable d'endosser mon épreuve quand j'aurai pu faire sans problème la tienne. Tu t'es enfui dans la cabane et surtout, t'en serais encore à hurler et appeler notre mère si tu t'étais ne serait-ce qu'égratigner l'épaule. Alors ferme bien ta gueule Alfie.

Ses doigts resserrent un peu plus leur prise, ramènent dans sa fureur leur visage, ses lèvres frôlent celles du sans étoile quand il hurle, la colère piquant le bord de ses yeux.

Toutes tes victoires tu les dois à mes fractures. Il trouve l’impertinence de sourire. Même aujourd'hui ça n'a pas changé.

La colère pousse à commettre l'irréparable. Le corps de Luke heurte le mur dans un bruit sourd. Le premium grimace, le choc est si violents qu'il a fait tomber du bureau un petit cadre posé là. Oh la colère pousse à commettre l’irréparable en effet. Luke a cessé de réfléchir il y a longtemps déjà, peut-être même avait-il cessé de réfléchir à la minute où il était sorti de cette foutue infirmerie. Son visage se déforme sous une colère et une douleur sourde. Il se décolle du mur, traverse la petite pièce en posant sa main sur la poignée de la porte délabrée.

Ah cette fameuse nuit ! Putain, faut que quelqu'un finisse par te le dire : Ouais, c'est de ta faute.

Il tourne un regard rageur vers lui. Luke ne l'épargnera pas dans sa plus cruelle vérité.

C'est de ta faute si Mia est morte. C'est de ta faute parce que TU as dit oui, parce que TU l'as emmené là bas, parce que TU penses avec ta queue plutôt qu'avec ton bon sens ! Mia n'a pas pu être sauvée parce que TU étais là.

Il ouvre la porte, furieux, explosif.

Tu peux m'en vouloir et me reprocher de t'avoir dénoncé, celui qui a enfreins les règles et pris des risques inconsidérés, c'est toi !

Il le pointe du doigt, sans lui laisser le temps de respirer.

T'es ici pour une putain de bonne raison et il est temps que tu l'assumes ! Sur ce va bien te faire foutre.

Il lui brandit un doigt bien sentit, va pour franchir le seuil et claque la porte derrière lui. Dans le processus, il a oublié de lui dire qu'il manque à des gens Alfie. Luke est trop bête pour réaliser que ça l’inclue lui.