amazed

l’index sur la lèvre inférieure ; réflexif. à l’écran défile la série de code du langage. vérifier les données, les entrées. la pièce silence où parfois cliquète le clavier. sur la table d’une propreté aseptisée, il réside ; sage. un robot qui peut se contenir dans les mains d’un enfant.

corriger une commande. c’est peut-être celle-ci qui faisait défaut. vérifier le driver et alors

entendre la porte s’ouvrir. ne lève pas la tête, swan ; on entendra ta voix si tu le cherchais, lui. alors confirmer le changement. défiler. c'est que les erreurs du langage informatique l'empêchent de porter attention au réel.

Evidemment.
Le traitre est là. La balance.
La règle est simple : l'ignorer. Il ne lui dit plus bonjour, Fox non plus. Et s'il le luit disait, il ne réagirait pas.
Et quand il passe derrière son poste, il l'ignore.
Il regarde.
Remarque des fautes.
S'arrête alors, continue d'observer, avant de briser ses propres règles;

- Je savais pas qu'on pouvait avoir trois étoiles et être bête comme ça. Tu te relis des fois ?

Clairement, ces erreurs ne méritaient pas une telle hargne. Mais c'est l'esprit du Père, d'en demander top non ? C'était pas un langage d'amour pour ces fidèles à la critique absente ?
Soupir las, qui racle la rancoeur mêlée à une frustration envers lui même; il n'a pas pu s'empêcher de glisser ses yeux vers l'écran de la balance...

- Pousse toi.

Pousse du pied les roues de son siège et se penche sur le clavier. Son regard passe en revue les lignes de code, arrange quelques oublis, fautes, fronce ensuite les sourcils. C'est quoi ça ?

- C'est pour faire quoi ?

Plisse les yeux.
C'est bizarre son truc. Et d'ailleurs, hors de question de le laisser finir sa réponse.

- J'aurais pas fait ça comme ça. C'est pas clair.

A son tour, il se perd dans le code.
Juste quelques secondes, puis il l'ignorera de plus belle.

ne prend pas la peine de réagir. tapoter sa lèvre inférieure de l’index. la dernière correction apportée. il suffit désormais de réinitialiser le programme. ne retient pas ton soupir ; s’apprête à peser sur la commande et tu

oses

le pousser. les roulettes pour chantonner sur le plancher. parfaitement graissées, translation impeccable jusqu’à la machine à café. sa tasse à côté de toi désormais devant l’écran que swan

écarquiller les yeux ; sidéré.

que–

arrêter la chaise d’une main sur le bord du comptoir. la cafetière allumée. froncer les sourcils ; swan, la voix se fait orage. latent.

gronde.

fox, retire tes pattes du clavier, espèce de–

le geste. vif. d’une poussée ramener la chaise vers l’ordinateur. mais c’est trop tard. tes doigts d’illettré ont déjà travaillé.

crétin, t’as pris tes cours de robotique dans la bouse des fermes ?

fourrer les iris dans tes yeux. espérer le temps d’une seconde avoir eu le pouvoir du feu ; qu’on t’aurait incendié sur place. lever le coude, planter dans tes côtes ; escrimeur a la précision de la fente, elle se veut violente. pour te repousser, reprendre sa place. et devoir

corriger tes erreurs.

j’espère que t’aurais pas fait ça comme ça ; tu viens de programmer teddy pour fist bump un.e enfant qui vient le voir parce qu’iel a fait un cauchemar. dumbass.

retaper les lignes de prolog. témoin muet devant toi et lui ; teddy, le robot des enfants. celui qu’on espère achever pour aider le reconditionnement, les punitions. démontrer la nécessité d’une bienveillance empathique dans le développement.

t'as déjà pensé reconnaître le langage informatique avant d'y taper l'incruste ? ça serait peut-être plus clair pour toi à ce moment.

Il entend le tonnerre, l'ignore à l'aide d'une flegme bien trop familière. Qu'est ce qu'il fera, hm ? Ils sont bien trop convaincu d'être sous le regard constant du Père, forcés à se tenir à carreaux; que peut bien faire Swan contre lui ?
L'insulter lui et ses talents.
Manque une touche, fronce les sourcils et le fusiller du regard en retour.
Il ne dit rien mais n'en pense pas moins : pour la robotique, Fox se démène. Et pourtant, en a t il seulement besoin ? Seule la voix lui permet d'obtenir ce qu'il désire des machines et autres ordinateurs, c'est qu'un hobby de pouvoir les coder lui même.

Puis, un coup.
Fox grogne, est écarté de force. Voilà l'impoli outré par l'attitude de la balance. Et cela repasse derrière lui en plus, pendant qu'il se tient les côtes.
Violence puis insulte, encore.
Ah, il mérite de perdre des étoiles pour cela !
Mais personne le croirait.

- Tocard.

Puisqu'il est occupé à coder, il s'empare du Teddy à deux mains. La peluche est soulevée à hauteur d'yeux, inspectée avec rigueur et la fourrure légèrement tirée pour voir les mécanisme en dessous.

- Et quoi, il doit faire un câlin peut être ? Chanter les louanges du Père jusqu'à l'assommer d'ennui ?

Remarque, faut bien les faire dormir à un moment.
Les nouvelles remarques viennent légèrement tordre les traits de son visage.

- Y a quoi à reconnaitre ? Tu as tout complexifié pour rien ! Tiens, rien que là !

Teddy en main, il pointe (très vaguement) une ligne de code. Puis, hésite, baisse la peluche et soupire.

- Je vois pas pourquoi je t'aide en fait.

Et enfin il s'éloigne, avec Teddy en otage. Fox ne va pas loin, il va juste s'appuyer contre le bureau derrière, pour garder à l'oeil le dos de Swan et son écran.

c'est plat. l'intonation.

tous les jours tu me prouves que t’es plus bête qu’hier.

et tu fais semblant de l’être. on le sait. croiser les bras, caler le dos contre la chaise.

une interaction humaine n’est pas aussi simple que de dire oui et non.

que de dénoncer ou encourager. tu as les oreilles sourdes, toujours. à quoi bon le préciser maintenant. hausser un sourcil, à te voir aller avec teddy. on le croirait presque conçu pour toi.

il faut plusieurs commandes et réponses pour un algorithme émotionnel.

combien de raisons au cœur pour pleurer. avoir peur ou bien espérer. il n’a pas inséré le père comme réponse. ici, dans l’enclave ; le baptistère avant le paradis, c’est une évidence. la somme de toutes les hypothèses. rien n’est pire que la répétition vide des croyances.

réinitialiser les programmes, swan. et la voix se fait franchise ;

appuie sur son museau
pour démarrer.

elle te parle comme si rien n’avait changé. précisément parce que swan
rien n’a changé.

enfant aussi ; on s’insultait, non ?
pourquoi alors tes mots à toi paraissent davantage amers. ces dernières années.

- Je suis plein de surprise, en effet.

Il ne l'est pas et il le sait.
Swan prend la pose du grand frère sévère. Lui l'épie, le visage inexpressif. Il attend, observe ce qu'est devenu "l'ami". Plus sérieux encore, retour à son état naturel, celui où il ne l'emmenait pas dans ses aventures en riant.
Ils sont vieux maintenant.

- Oh ?

Feindre l'ignorance, offrir un léger soulèvement de sourcils. Cela avait l'air simple de vendre son meilleur ami au Père pour un peu d'étoiles, mais Swan prétendra le contraire. Swan ne s'expliquera pas et lui, les mots restent encore au travers de sa gorge.
Ce n'est pas pour tout de suite.
Fox ne sait pas s'il viendra à en parler lui même de si tôt.
Et son regard se porte alors sur Teddy, l'ami idéal.

- Ce serait un bon projet, entre les mains de quelqu'un d'empathique.

Pas toi.

- T'as trouvé l'idée tout seul ?

Surprenant.
Mais il t'écoute, et appuie sur le museau. La peluche prend vie, et Fox l'observe en silence. Elle se présente robotiquement. Léger sourire aux lèvres, qui finit par se transformer en rictus.

- Et maintenant ? Je dois pleurer, c'est ça ?

Un regard vers Swan, puis revient à la peluche.
Que faire ? Il est devenu trop blasé que pour pleurer. Les rires sont rares aux aussi, Fox ne sait que s'en prendre à la fierté d'autrui.
Il tente malgré tout de renfiler, et feint de s'essuyer les yeux comme s'il séchait une larme symbolique.

tu fais semblant. et peut-être que ça t’amuse. assurément ça doit t’amuser pour que tu performes performes performes tout le temps tout le jour toute la nuit

avec lui.

t’observer. peut-être qu’on cligne. parce qu’il faut se rappeler qu’on est vivant. tu fais semblant malgré tout c’est évident

tu ne dis rien et tu dis tout. ce n’est pas qu’on ignore pourquoi. endosser le titre d’ennemi ; swan, ça fait longtemps qu’on l’a accepté. mais comprends-tu – toujours il s’arroge le droit de penser que tu comprends – que ton absence d’accusation est précisément cela ;

une accusation.
as-tu pensé à autre chose depuis sept ans ?

comme il pense chaque jour que cette fois, tu voudras bien parler. pas comme avant. ce ne sera jamais comme avant. pourtant tu reviens et c’est ce qui le fait espérer

car il est avare de temps et ne parle du cœur qu’au bon moment.

tu penses que je ne suis pas empathique ?

c’est tout ce qui importe maintenant. oublier soudain teddy.
ce que tu penses.

L'ours tend les bras vers lui, se fait réconfortant. C'est un robot plus à l'écoute que tous les blocards réunis. Fox ne le laisse pourtant pas l'atteindre pour donner cette étreinte qu'il mérite pourtant.
Non, à la place, ses yeux se lèvent vers Swan.

- Si tu l'étais, tu serais cruel.

Quel genre d'ami empathique vendrait le garçon turbulent aux parents sans profiter de son désarroi ?
Mais la preuve du contraire est logée entre ses mains à ce moment même. De nulle part, Swan se préoccupe du bien être des enfants de l'enclave et se promet de leur offrir le support dont ils ont besoin.
Les sourcils se froncent tout seul : c'est le coeur qui se serre.
Ce support, Swan aurait pu l'offrir de lui même. Mais Swan a tourné le dos à la place.
Il faut ignorer la peine.

- Puis vous pensez qu'à vous.

Garder le dos droit, le regard froid et le visage fermé.

- Y que tirer les autres vers le bas pour s'élever. Un putain de seau de crabes, c'est ça cette fichue enclave.

Fox ne la voit pas, l'empathie là dedans. Tirer dans les pattes des autres, prétendre sourire et se soucier des autres. Au fond, tout est faux. C'est la course au mérite et au regard de Père.
Et eux, les plébéiens.
Des retardés.

Lever la peluche, la secouer légèrement, tête légèrement penchée.

- Alors ? C'est plus facile de coder l'empathie que de la pratiquer ?