amazed

bien sûr. tu te trouves à la cuisine. résonne encore aux oreilles le tintement des couverts. la rumeur des paroles incessantes des tables. c’est peut-être parce qu’il se porte toujours volontaire pour rapporter sa tasse ; qu’en chemin elle se casse. et la cantine ce matin encore pleure la porcelaine. elle gît au creux du porte-balai, aller jeter les morceaux dans la poubelle de la cuisine.

où la mousse recouvre tes bras et le tintement des couverts précède leur éclat sur le rack.

dis-moi,

bonjour, alfie.

combien de temps veux-tu que ça dure ?

contre le sac noir, la porcelaine chute en cliquetis.

encore quelques semaines ? deux ans ?

le temps du paradis ?
as-tu remarqué ; on a dit veux-tu
(on espère que tu remarqueras la nuance)

grand frère paraît un peu incongru dans l’espace. planté ainsi ; balai en main, tellement droit on pourrait l’imaginer lance. la nuit des iris pour t’observer, comme une évidence. elle est tranquille, la sentence dans ses yeux. sévère pourtant.

il y a le spectre d’un sourire, quelque chose de l’amusement quand il lève un sourcil. l’assiette pour se briser ; ah. c’est que certaines variables semblent garder leur constance. alfie et tout le bataclan, avec le temps, qu’il fallait réparer. rétablir pour éviter les conséquences.

seulement cette nuit-là dans le labyrinthe ; personne pour éviter les conséquences.

l’évidence, quand il s’agenouille – sous l’amplification ; tendre les doigts et saisir le plus gros des éclats. balai toujours dans l’autre main. et alors la porcelaine peu à peu reconnaît sa chair-céramique blanche. qu’à mesure que se tissent les fils de le restauration, le long des fragments épars à tes pieds, les iris s’ornent de rouge où trois points noirs scintillent.

ils étaient quatre. avec le temps, à vouloir protéger les bêtises ; l’un s’est perdu. sacrifié.
comme toi on suppose. avec tes amitiés.

je l’entends.

il ne s’en lassera jamais ; l’étrange délicatesse – presque religieuse – de la reconstruction. l’assiette à la manière d’une chirurgie se recoud se recolle on entend le frottement de la céramique avant qu’elle ne fusionne

immaculée comme si rien n’est arrivé.

se relever, les iris écarlates pour se planter dans ton regard. déposer l’assiette sur le comptoir.

déçu, certes. par les enfantillages qu’on te fait faire. et par ta réaction. alors dis-moi

poser sa main sur la hanche.

est-ce ainsi que tu veux défier les choses ? c’est peut-être une façon de supporter le deuil, remarque.

plisser les yeux. geste infime. et la nuit des iris reprend sa place.

mais ce n’est pas juste une question de perte, hm ?

se retenir.

c’est peut-être la perception du temps qui diffère. dans ta situation ; on se demande combien de jours combien de nuits seraient nécessaires pour se reprendre. au nom du père ; au nom de soi plus que quiconque.

robin a-t-elle cherché à te remettre sur le chemin ? t’a-t-elle offert son aide ? le devrait-on aussi, swan. pourtant les yeux rivés sur toi ; une certitude pour forcer sur la même latitude les étoiles et leur absence.

indifférent, swan. à la hiérarchie performée. réside dans les castes une toute autre signification.

déception et honte ne sont pas liés. tu ne me fais pas honte. luke n’est pas dans ta maison pourtant il te fait quelque chose.

mais peut-être avec le temps, comme avec les autres on cessera de se soucier. t’observer à l’horizontal dans une distance formelle malgré tout. aider. veiller. sans chercher l’amitié. si cela arrive, c’est qu’il ne fera pas partie des rencontres liées à ton âme.

c’est tout.
c'est tout.

j’ai du mal à comprendre pourquoi tu ne l’estimerais pas aujourd’hui encore. pour une question d’étoile ? tu peux remonter comme il peut descendre. les étoiles ne devraient pas représenter une amitié.

déposer contre le mur le balai.

ni superficiellement le paradis. qu’est-ce qui te fait sentir paumé ? tu m’avais l’air bien assuré dans ton insulte.

c’est presque une raillerie.

te retenais-tu même avant la perte de ton rang ?