amazed

Le regard plongé dans le vide, au dessus de toi, trois sources de lumière se battaient entre elles, la lumière artificielle du lampadaire à côté de toi, qui éclairait le banc, la lumière naturelle de la lune qui éclairait la place et la lumière toxique de ta cigarette qui éclairait ton visage. Tant de lumière mais tout était sombre, tes pensées était loin d'être aussi éclairée et tu broyais du noir, allongée sur le banc, enchainant les cigarettes car c'était la seul chose qui te faisait oublier ton stress.

Tant de choses prenaient place dans ta vie, tu avais l'impression d'être dépassée, tu étais dans une voiture envoyée à pleine vitesse, le moteur à deux doigts d'exploser mais tu ne voyais à tes pieds que la pédale d'accélération. Tu ne savais pas quoi faire, où aller, qui aller voir. Tu étais perdue dans la brume tout simplement, qu'est ce que tu pouvais bien faire. C'était effrayant, tu avais la sensation que peu importe ce que tu ferais, ce serait le mauvais choix. Si seulement quelqu'un pouvait tout choisir pour toi et te permettre de te reposer quelques instant, reprendre ton souffle.

Tu avais la sensation de n'avoir jamais été aussi faible, toi qui t'étais toujours vantée d'être d'une solidité sans égal et de n'avoir peur de rien, c'était tout l'inverse que tu montrais ce soir. Tu te rendais petit à petit compte que tu étais une grande tour de pierre qui semblait indestructible mais dont les fondations tenaient sur de simple morceau de bois. C'était horrible tout simplement, tu sentais qu'il suffirait d'un élément pour que tout chute et que tu termine en miettes.

Et peut être que c'était pour le mieux ? Pouvoir te reconstruire sur de meilleure base, des plus solides, des plus saines. Tu étais perdue.

Ton regard se tourna alors vers la nouvelle venue venant alors te redresser un peu.

- Les parents ont dit que c'était totalement sans danger. Alors tant que ce sera le cas, je vois pas le soucis à continuer. Et puis c'est la seule chose qui me permet de combattre le stress...

Sa question te fit bizarre, personne ne te demandais si tu allais bien, ils n'avaient pas besoin, tant que tu fonçais, tout allait bien, tu restais droite et tu continuais sans te poser de question. Mais jamais encore tu ne t'étais dit que tu pouvais aller mal, c'était étrange comme vision.

- Je ne sais pas... C'est pas facile ces temps ci à vrai dire...

Tu n'arrivais plus vraiment à savoir comment ou où te placer à vrai dire et la seule chose que tu trouvais comme réponse c'était que tu étais perdue.

- Et toi ?

Il en allait de même pour l'inverse, tu ne demandais jamais si les gens allaient bien, car tu n'en avais ni le besoin ni l'envie, si les gens allaient mal, cela était de leur privé et tu ne voulais surtout pas supporter leur états d'âmes, à te retrouver à devoir les réconforter d'une manière ou d'une autre.

Et rapidement tu écrasa ta cigarette sur le banc, t'y réinstallant normalement afin de laisser la place à la jeune femme pour s'y installer. C'était assez étrange comme moment, il y a quelques mois tu n'aurais pas pensé que tu pourrais te retrouver dans une situation telle avec une personne comme Mielle.

Le prix des cigarettes était loin d'être un soucis à tes yeux, tu avais des moyens assez simple de t'en procurer et en plus, ce n'était pas comme si tu utilisais tes ticket d'une façon où d'une autre.

Tout semblait bien aller du côté de Mielle, enfin elle semblait tout le temps dire que tout allait bien, tu ne savais pas qu'elle était la réalité derrière tout ça mais bon, tu savais très bien que ce n'était simple pour absolument personne.

Il était tard, tu avais en cette heure, déjà retiré ton armure depuis un moment, tu étais à nu, dans le froid effrayant de la vie, perdue dans le noir, sans aucune lumière pour te guider mais Mielle brillait, elle avait ce don pour tout le temps briller, c'était probablement pour ça que tu avais si longtemps voulu t'en éloigner, tu ne voulais qu'elle t'aveugle, tu étais bien plus à l'aise dans l'ombre, celle des murs de ce labyrinthe, dans celle du volet de ta chambre, ou bien de la nuit noire extérieure.

- Je ne sais pas. En fait je sais juste pas où j'en suis, si je dois suivre une certaine logique, ou mes sentiments, mais j'ai cette sensation qu'aucun des deux n'est la solution. Alors je suis juste perdue.

C'était pour toi un véritable aveux d'echec, d'autant plus auprès d'une personne que tu avais critiqué quelque semaine auparavant. C'était comme si le destin avait décidé de te montrer qu'en réalité tu étais une personne hypocrite et méchante.

- C'est comme si j'étais au bord d'une falaise, j'ai l'impression que si je ne prend pas la bonne direction, je vais tomber.

C'était surement normal pour la plupart des gens de se sentir perdu, mais pas pour toi, tu avais tellement eu l'habitude de visionner les choses comme une ligne droite, qu'à aucun moment tu ne pouvais imaginer que tu puisse te retrouver dans une situation où tu ne savais pas où était le départ et où était l'arrivée et tu n'en savais même plus s'il y avait une arrivée quelque part.

- Certes.. mais ça semble si court. Je ne sais même pas si j'arriverais à m'en sortir dans ce foutu labyrinthe avant que j'atteigne mes 30 ans.. Alors j'ai pas le droit de me sentir perdu et de gâcher du temps de la sorte.

Tu avais aussi l'impression que peu importe ce que tu choisissais, tu risquais de foncer dans le mur et tu n'avais aucune idée de si tu serais capable de te relever.

- Car j'ai que ça, je pourrais perdre le peu que j'ai, ce rôle, cette détermination et mon objectif, si je perd tout ça, je ne sais pas ce que je serais capable de faire. Peut être que je trouverais en cet instant, mais c'est effrayant.

Tu ne comprenais toujours pas comment ils faisaient pour vivre, pour vivre sans se poser de question. Toi tu ne pouvais vivre qu'uniquement car tu savais que tu avais entre tes mains les possibilités de tout changer. Tu te disais que sans ça, ta vie serait vide de sens. Regarder sa propre vie défiler devant ses yeux, ce n'était pas ce que tu souhaitais.

Mais peut être qu'ils avaient raison, après tout, eux, ils vivaient heureux.

Qu'est ce qui arriverait si jamais tu ne trouvais pas cette sortie ? Cela ne risquerait pas d'arriver. Tu trouverais cette sortie, tu n'avais pas le choix, tu devais trouver cette sortie. Alors tu ne préférais même pas imaginer ce qui pourrait arriver si jamais ce n'était pas le cas.

- C'est à moi de la trouver. C'est ainsi. J'y ai mis quasiment toute ma vie, j'ai travaillé trois fois plus dur et trois fois plus longtemps que n'importe qui dans cette enclave, alors je ne peux laisser personne d'autre l'honneur de trouver cette sortie. A quoi ça servirait, de me donner chaque jour autant, si jamais c'est pour ne trouver aucune réponse. Mon rôle n'aurait aucun sens. Les gens peuvent penser ce qu'ils veulent mais si je n'arrive pas à trouver cette sortie, je n'aurais servie à absolument rien.

C'était ainsi, un fermer est utile car peu importe ce qu'il faisait, il serait capable de nourrir des gens. Cependant en tant que coureuse, si vous ne trouvez rien, vous n'aurez jamais été utile. Alors à quoi bon faire ce rôle si ce n'est pas pour se battre et essayer d'accomplir la mission que l'on t'avais donné.

- Je me demande simplement si je n'aurais pas dû depuis le début, prendre une autre voie et simplement profiter de ma vie comme beaucoup d'entre vous.