amazed

Elle qui sembler errer depuis des mois au sein de l'Enclave, son cœur ne battant que pour les expéditions du Labyrinthe et les quelques moments avec ses amies. C'était bien là les seuls moment où elle se sentait un peu vivante. Pour le reste, entre son pouvoir et les médicaments, Abyss était comme morte.

Mais depuis l'escapade dans le dédale avec Max, depuis les révélations sur le système et son envie de s'en soustraire, depuis que Abyss avait réalisé qu'elle n'était pas seule, quelque chose avait changé. Une flamme nouvelle brillait dans ses yeux et Abyss s'était lancée corps et âme dans les secrets du Labyrinthe et de l'Enclave. Elle travaillait d'arrache-pied en salle d'étude ou proche des murs, notant et griffonnant milles idées et théories sur une possible sortie.

Le dîner est passé mais Abyss ne se rend pas au Social Club. Cela fait longtemps qu'elle évite les foules et leur bruit. Elle a tendance à aller directement s'enfermer dans sa chambre après manger. C'est plus calme, plus agréable.
Mais pas ce soir.

Ce soir, Abyss a la tête pleine d'idées. D'un pas frénétique et déterminée, elle parcours les couloirs de la société, perdue dans ses pensées. Elle ne sait pas où elle va mais ce n'est pas l'important. Marcher l'aide à réfléchir, comme lorsqu'elle court dans le Labyrinthe. Il ferme d'ailleurs bientôt, d'ici moins d'une heure. Elle hésite à y aller. A commettre l'interdit. Elle pourrait, là, filer, s'éclipser, et disparaître dans la nuit. Elle ne sait pas si c'est vraiment une bonne idée. Mais après tout, pourquoi p -

Boom.

Elle n'a pas vu la personne sur son chemin. Elle ne l'a pas entendu non plus, ni ressenti d'ailleurs. Abyss se heurte à quelqu'un. Le choc la fait tomber en arrière et son carnet s'échappe de ses mains.

"Ah. Pardon."

Elle le rattrape rapidement avant que l'autre ne puisse l'attraper. Il a fini ouvert au sol, dévoilant des plans des sections du Labyrinthes et quelques notes. Abyss relève la tête, observer la personne. Il s'agit de Bob. Elle ne le connaît pas bien, de vu seulement.

"Je ne t'ai pas fait mal ?"

La question tombe par politesse mais la réponse ne l'intéresse pas vraiment. Abyss rattrape les feuilles éparpillées et se prépare à partir pour reprendre sa route et ses réflexions.

Le garçon n'est pas blessé, ainsi Abyss récupère le reste de ses affaires et poursuit sa route. Mais la voix la retient. Attends ! Qu'il s'exclame. Abyss hésite, fait volte-face.

"Oui ?"

Toujours par politesse. Et puis Bob se penche sur un de ses papiers, sur une des sections. Abyss encaisse le flot d'information. Elle se tend au début car elle n'apprécie pas qu'un inconnue viennent la corriger sur son sujet de prédilection.

"Je sais." Elle réplique froidement. Ces notes sont vieilles. Et elle ne note pas tout. Elle n'aime pas non plus la manière dont il parle de Alfie. Le désigner par un accident la révolte. Alfie n'a rien d'un échec. Il est son ami. "Qu'est-ce que tu v-"

Veux ? Mais Abyss ne fini par sa phrase. Tu es l'ingénieure. Les mots raisonnent dans son esprit. Elle ne sait pas pourquoi, mais ils forment un écho au plus profond de son âme.
L'ingénieur.
C'est vrai, Abyss est l'ingénieure.

Elle baisse la tête, affiche un sourire doux. Cela n'a aucun sens de s'énerver. Cela n'a aucun sens d'être si tendue. Cela n'a aucun sens de se brusquer. Cela n'a aucun sens de le rejeter. Abyss est l'ingénieure. Comment a-t-elle pu l'oublier ?

"Oui. Tu es ?" Peut-être qu'il faut commencer par là. "Tu as l'air de t'y connaître." Sur le Labyrinthe. "Je suis Abyss. J'allais voir les portes. Tu veux venir ?"

Elle sourit toujours. La voix est devenue plus humble. Elle a fouillé dans le cœur de Bob et n'y a sentie aucune animosité, aucun mépris, juste de la curiosité. Elle n'a dont aucune raison de se braquer. C'est un mauvais réflexe acquis par la paranoïa d'un système qui veut la faire croire folle. Mais elle s'est rappelée de sa sortie avec Max: elle n'est pas seule. Abyss est l'ingénieure et il y a des blocards, ici, qui comptent sur elle. Pour le Labyrinthe, pour la sortie, et pour tous le reste.

Bob. Il s'appelle Bob. Elle fouille dans les méandres de sa mémoire, fait défiler les noms et les visages des autres blocards. Bob. Ah, oui. Elle se souvient maintenant: c'est un ancien premium. Abyss n'y a jamais accordé d'importance puisqu'elle n'a jamais regardé les trois étoiles et les premiums comme les regardes les autres. Il n'y a jamais eu envie ni jalousie dans son regard, que du mépris. Mais Bob a perdu son étoile, récemment. Ainsi peut-être est-il différent.

"Ah, oui, c'est toi." Murmure-t-elle. Elle se souvient que ses coureurs lui en ont parlé. Abyss n'a jamais osé trop s'y intéressé car elle laisse les détails techniques à ceux qui pratiquent. Si elle court également, cela reste moins que ses coureurs et Abyss s'en remet quasiment toujours à l'esprit plutôt qu'au corps. "Merci pour tout ce que tu fais, pour eux…"

C'est maladroit, un peu bancal. Elle ne sait pas bien si elle a le droit de parler à la place des autres mais le sentiment reste sincère. Grâce aux ingénieurs comme Bob, la vie des coureurs est plus simples et les patrouilles sont plus sûres.

La curiosité est désormais piquée alors que les mots sacrés sont prononcer: "je veux résoudre le Labyrinthe", "je veux trouver la sortie". Le regard de Abyss brille. Et si Bob était celui dont elle attendait la venue depuis si longtemps sans même le savoir ? Et s'il était l'esprit lui apportant la lumière d'un soutient indéfectible dans ses lubies réprimées ? Et s'il était l'épaule sur laquelle s'appuyer alors que le monde entier la fait douter ?

"Moi aussi. Moi aussi je veux résoudre le Labyrinthe."

Et trouver la sortie, même si ce n'était pas vrai avant. Pendant longtemps Abyss ne cherchait qu'a craquer le code et triompher de l'énigme. Le Paradis était accessoire, les blocards aussi. Elle n'était muée que d'un égoïsme terrible dans ce défi qu'elle s'était donnée. Aujourd'hui, c'est différent. Abyss veut partir et sauver ceux qu'elle aime, aussi. Cela lui donne encore plus de raison de se jeter à corps perdue dans les méandres du Labyrinthe.

"Les traqueurs, ce serait pratique. L'accès de nuit est interdite à cause des monstres et si on arrive à peu près à cartographier après chaque jour et à en déduire les mouvements, il se peut que ce soit bien plus élaboré que nos suppositions, puisque c'est caché, tu comprends ?" Ce qu'elle veut dire. Entre le point A et le point B, si la conclusion est la même, les chemins pour y arrivés peuvent être différents. "J'aimerai vraiment savoir ce qu'il se passe la nuit, quand les murs bougent. Je me dis que…"

Elle hésite.

"Non, rien."

Pas maintenant. C'est encore un peu trop tôt. Abyss confiera sa théorie quand la confiance sera acquise et qu'il n'y aura d'autres choix. Pour l'instant, elle garde ça pour elle, préfère explorer d'autres hypothèses. Ainsi, elle change de sujet:

"Parles-moi de tes créations. Pour scanner les pièces. On a nos carnets et nos dessins mais… est-ce que tu savais que le Labyrinthe n'était pas que en 2D mais aussi en 3D ? La section 7 par exemple. C'est embêtant à représenter sur une feuille. Comment ça marcherai, ton scanner ? Et sur une surface de combien, à peu près ?"

Les questions sont techniques mais Abyss a l'esprit scientifique. Elle a besoin de comprendre pour pouvoir imaginer les possibilités.