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Mielle… Mielle elle l’aime, un peu, beaucoup, passionnément, à la folie…
enfant juste ayant trouvé la foi, elle ne s’égare pas comme tant d’autres. elle représente le modèle à suivre, à quelque chose près. en récompense de sa sûreté, Heya lui jure clémence absolue. dans son journal des lamentations, le nom de Mielle est encré avec une gracieuseté plus appuyée, seules des éloges à son égard y sont inscrites.

Heya se pavane à travers les différents étages, elle sait ce qu’elle cherche car son destin lui est tout tracé. le Père la guide et elle se contente d’inscrire ses pieds dans les traces de pas se présentant à elle sur son chemin. la chambre de Mielle est sa destination. ses phalanges se cognent à la porte d’entrée. c’est moi, mon enfant. elle lui informe avant de se permettre d’empoigner la porte. elle se faufile dans l’entrebâillement crée. à la vue de Mielle, un sourire naît sur son visage. étais-tu en train de prier ? il existe une mauvaise réponse. la bonté du Père m’a guidé jusqu’à toi. il voulait que je m’assure que tu te portes bien.

Heya s’invite sur le sol de la pièce, ses mains prennent une place naturelle sur ses cuisses.
elle plonge ses iris dans celles de Mielle lorsqu’elle lui adresse la parole. dès lors où elle se tait, ses yeux se perdent sur la chambre de cette dernière. elle inspecte le lit, les murs, puis se balade sur les étagères. ta chambre te convient-elle ainsi ? Heya s’enquiert, elle cherche à se délecter des ambitions de Mielle. son bonheur sera le sien. notre Père récompense ses enfants travaillant le plus durement. dans la bouche de Heya, cela s’apparente autant à un reproche qu’à un encouragement.

les enfants sont amour et sans péché. Mielle a vingt-deux ans, dans huit ans elle soufflera ses trente bougies, les dernières de sa vie. ce jour-là, Heya versera un torrent de larmes. et une lame aiguisée pénètre déjà sa peau lorsqu’elle réalise que l’enfant n’en est plus une.

ta présence est un cadeau suffisant. Heya rassure une Mielle aux mains vides par ses paroles et le sourire chaleureux d’une mère. elle lui prête une oreille attentive lorsqu’elle s’exprime sur ses tracas. hoche la tête, non pour approuver ses dires mais pour montrer la sincérité de l’écoute. ses yeux se lèvent au ciel, en direction du Père Suprême. elle réfléchit à sa réponse à venir et sait pertinemment que lui seul est en capacité de lui offrir les mots justes. le Père t’as déjà gracié deux étoiles. elle se penche vers la jeune adulte et lui confie dans un murmure. à ton âge, j’en avais deux également. une dizaine d'années supplémentaires se sont ajoutées à son compteur ne s’étant pas arrêté il y a cinq ans. tu as la foi, mon enfant. le sourire de Heya est si grand que ses joues recouvrent presque entièrement ses yeux. cela signifie déjà tout.

puis un silence prend place dans la pièce. Heya reste concentrée sur l’attente d’un signe du Père Suprême, elle recherche sa présence dans l’air. là où tu te négliges, le Père pense à toi. Heya poursuit la quête que le Père lui a confié aujourd'hui : rassurer Mielle. il t'aime pour mille. sa main prend une place réconfortante sur la cuisse de Mielle. tu es proche de lui et il le sait. si tu continues ainsi, il t’accordera davantage d’étoiles. et si satisfaire le Père te semble trop difficile à réaliser, commence par me satisfaire moi. je ne suis pas de sa grandeur infinie, je ne suis donc personne pour prétendre réclamer auprès de toi. mais ce qui me ferait plaisir, et ce qu’il te manque d’après moi, c’est de te confier. je ne te parle pas de tes péchés, ils sont propres à toi. il faut les répéter au Père Suprême. moi, ce que je souhaite entendre, ce sont les péchés des autres. les non croyants… Heya marque une pause dans sa phrase, la déception prend le dessus lorsqu’elle pense à ces blocards ignorants. eux… ils ne se confient pas comme tu peux le faire. pourtant certains ont un rang plus élevé que le tiens. ce qui vous différencie, ce sont les secrets des autres. Heya l’invite à se confier auprès d’elle, à lui avouer des vices ne lui appartenant pas dont elle s’est emparée.

entre Mielle et Heya, la conversation vire facilement au divin. Heya apporte ses connaissances du Père sur un plateau d’argent, espérant que Mielle s’en délectera avec joie et enthousiasme. pourtant, cette conversation a tout de banal. pousser à faire mieux, c’est la volonté de toute mère formatée.

me faire plaisir à moi passe par la réjouissance du Père. un énième sourire à l’égard de Mielle se dessine sur le visage de la mère. elle ose par la suite, une main attendrissante venant replacer une mèche de cheveux de l’enfant. un geste comme un autre, sous-entendu de la grande affection qu’elle lui porte. je te conseille d’écouter ton cœur, Mielle. elle lui dit en suivant des yeux la main de la blocarde se posant sur son cœur. il est vrai que toi comme moi ne sommes personne pour juger autrui. cela dit, si tu juges qu’un blocard court quelconque danger, aussi minime soit-il, j’aimerais que tu m’en fasses part. ton rôle de surveillante te pousse déjà à le faire, ta foi t’encourage à le faire, et moi de-même. Heya marque une pause dans sa phrase. ce qui fait également partie de ton poste, c’est effectivement la transmission de secrets à une figure supérieure à ton rang. tu as peut-être des connaissances sur d’autres blocards qui te permettraient de monter en grade, de satisfaire le Père Suprême… de me satisfaire : moi. elle insiste sur ce dernier mot. je ne te force pas la main. prends ton temps, mais c’est la meilleure manière pour toi de te hisser vers le haut.

lorsque j’étais encore blocarde, je me mettais peu en avant. ma discussion avec Mielle me rappelle ma peur ancienne de rapporter, qui maintenant n’est plus. cette peur a disparu lors de ma rencontre avec le Père Suprême. en y pensant, je ne m’en rendais pas compte. c’est avec du recul que je m’aperçois qu’il m’a permis de traverser ce que je décrétais comme étant une dure épreuve.

certains enfants sont nés avec cette envie, presque comme un don du ciel, de recueillir les secrets des autres afin de se les approprier et de les distribuer à tout va. d’autres, plus égarés, n’en ont pas encore le courage. il est de mon rôle de mère de les porter comme le Père l’a fait avec moi alors que je n’étais encore qu’une adolescente.

tu sais… cette pensée, je la confie à Mielle. autrefois, je ne confessais rien. ni mes péchés, ni ceux des autres. sans le savoir, cela me rendait bien malheureuse. quand le Père m’a sauvé, il m’a libéré de cette peur, de cette honte presque, de garder ces péchés pour moi. pour accéder au Paradis, tu dois penser à toi, ma fille. ces mots, je ne l’adresse qu’aux plus privilégiés de mes enfants. à ceux qui, dans mon cœur, ont cette place élitiste. ces enfants ont fait leurs preuves auprès de moi et doivent se contenter de les faire auprès du Père avant de partir. ne pense pas à la souffrance d’autrui, ce n’est pas ton rôle. je ne sais pas si mes paroles changeront quelque chose. j’ose espérer placer mes paroles les plus sincères dans le cœur de mon enfant le plus proche.

les révélations me tombent dessus comme une bénédiction du Père tout au long de ma vie. c’est Mielle qui se confie et se libère de ce que je désigne comme étant un fardeau, mais ce sont mes épaules qui s’allègent, mon dos s’est redressé je me tiens davantage droite désormais. je hoche la tête lorsqu’elle se confie à moi, si elle les tendait un peu, j’oserais lui attraper les mains afin de lui montrer que je m’abreuve de chacune de ses paroles, qu’elle comprenne l’importance d’en faire autant.

ce qui m’intéresse ne sont pas les faits en eux-mêmes. ce que font les blocards en dehors de croire ne m’intéressent pas plus que cela. Mielle me donne des informations triviales qui ne lui serviront qu’à elle. moi, je n’ai pas d’étoiles à gagner et plus de Paradis à atteindre.

une larme humide d’émotions naît dans le coin de mes yeux, elle ne tombe pas mais m’obstrue légèrement la vision. je suis émue. en Mielle, je me retrouve un peu. du moins, j’aurais aimé être comme elle étant plus jeune. aujourd’hui, il est trop tard pour moi, mais me voilà remplie de fierté quand je la vois se confier à moi avec un tel débit.

tandis qu’elle me confie les péchés de ses ami.e.s la troublant, je continue de faire oui de la tête, lui indiquant qu’il est bon pour elle de continuer sur cette voie. c’est ce chemin qui lui offrira le Paradis, j’en suis certaine.

les noms de Nine et Kafka sortent de sa bouche mais une pause s’annonce, j’en profite pour lui glisser quelques mots. c’est très bien, ce que tu fais. je m’étendrai davantage lorsqu’elle m’aura confié la suite de ces histoires.

que je suis fière de toi ma fille. je le pense d’abord, sans transmettre cette pensée à Mielle. à la place, je la laisse terminer les confessions d’autrui. je n’ai pas bougé depuis que j’ai pris place dans son espace personnel. je la suis simplement du regard lorsqu’elle s’abreuve et en retour boit ses paroles consciencieusement. Nine et Kafka sont tous les deux fautifs. je ne les ai jamais vu s’approcher du Père. je soupire. ils sont fichus en quelque sorte… contrairement à toi, ma fille. je m’égare sous l’émotion impétueuse et préfère assurer à Mielle mon soutien inconditionnel plutôt que de la rassurer vis-à-vis d’enfants qui n’ont pas de maison dans mon cœur. je sais qu’ils se feront punir comme il se doit lorsque ces nouvelles se feront remonter. le Père est juste dans ses jugements et ses châtiments.

je me relève et défroisse mon yukata. quand à toi, ma chérie, il te récompensera pour tout ce que tu fais de bien. si je crois en toi, ce n’est pas pour rien. le Père t’aime tant, son amour pour toi est plus grand encore que le mien. cela me brise presque un peu de le dire, mais je me dois d’être sincère avec mon enfant favori. au Paradis, il n’y a de la place que pour les enfants comme Tess et toi, tu vois ? vous suivez le chemin à suivre. et puis, tu viens à l’instant de te garantir une étoile de plus, sois-en sûre, ma fille. je lui souris, heureuse d’avoir pu aller au bout de ma mission. mon cœur et mes épaules sont libérés d'un poids, j’ai complété aujourd’hui la mission divine que le Père m'envoyait accomplir. si ton cœur se trouve rassuré, je te laisse ici reprendre le cours de ta journée. autrement, mon cœur à moi est toujours ouvert pour toi. une courte pause. mon Nexus est également disponible, bien que, ne m’en veux pas, il m’est un poil difficile de suivre toute cette technologie. j’attends sa confirmation à ma tentative certaine de la rassurer et me hâte vers l’attente d’une nouvelle requête du Père.