amazed

Ces histoires d’été Nine ne les a pas vécues. Pourtant il suffit d’écouter les bruits de couloir, ou de s’immiscer entre les conversations pour connaître les évènements ratés. Les détails sont parfois flous, déformés voire totalement faux car les sentiments aiment modifier les souvenirs - il ne sait pas tout mais l’essentiel, et cela suffit toujours à Nine pour ne jamais se sentir exclu des sujets abordés. Il en rigole bien.

Mais parfois les discussions finissent pas tourner en boucle - et à force de répéter les mêmes choses Nine s’en lasse plus facilement. Il rigole moins, alors il se lève et quitte le cercle.

“Faire un tour - je sais pas.”

Leon le suit mais il ne ralentit pas.
Il n’a pas décidé où il allait encore, il se dit qu’en faisant un dernier tour il trouvera quelque chose de plus intéressant - même s’il tombe sur un parent après le couvre-feu il s’en amusera plus.
Leon le suit toujours,
et Nine ne ralentit toujours pas -
s’iel l’accompagne, il faut le faire à son rythme.

Finalement il s’arrête à ta dernière question. Et se retournant à moitié, il attend que tu arrives à son niveau. Ainsi il peut te fixer un instant.
Il essaie de comprendre si cette question venue de nulle part était signe de confidence - tu te poses encore la question alors que ça fait un mois maintenant ? Il n’y a que les regrets qui font questionner nos actes.

“Pourquoi t’en parle comme si c’était un devoir ? T’es pas responsable de ce qui s’est passé, non ?”

Il reprend la marche.
Moins vite.

Leon lui montre ces aspects un peu plus frêle de sa personne - c'est presqu'une chance !

“Puis même si t’avais une part de responsabilité : est-ce que t’avais envie d’intervenir ? T’aurais fais quoi même ?”

Il trouve ça bête, les remords.
Ces et si qu’on ne pourra jamais vérifier.
Des questions sans réponses, sans aucune solutions -
Plus elle s'étend dans le temps, plus la culpabilité ronge de manière illogique.

“J’étais pas là, non.”

Il a loupé les explosions d’amour meurtri et des cœurs brisés par l’injustice.

“Mais j’aurais bien aimé voir ! Et à ta place j’aurais rien fait.”

Parfois être spectateur lui suffit. C’est pour cette raison qu’il aime aussi le cinéma.

“Saint aurait fini par le savoir à un moment ou un autre de toute façon. C’est pas ton problème.”

Il finit par ricaner. Car même la réaction de Saint - comme il l'imagine - lui semble démesurée.

"Et c'est pas parce qu'il est éperdument amoureux de Prim qu'elle lui doit quelque chose en retour."

Il se met à rire fort. Sa voix résonne dans la nuit, ne cherchant même pas à se faire discret - on à l'habitude d'entendre cette voix hilare au loin, à force on n'y prête plus vraiment attention.

“Sérieux ? Raison de plus alors !”

Savoir que tu as incité cette réaction bouillonnante de rage chez Saint est un détail qu'il découvre ce soir. Et en imaginant de nouveau la scène - incluant ta présence inquiète - il comprend mieux la raison de ces remords qui t'ont tourmenté.
Et cela ne fait que confirmer la position hypothétique de Nine dans cette histoire : à ta place il n'aurait jamais rien fait de plus. S'il était toi, il aurait soufflé l'idée afin d'éveiller les vices hargneuses pour admirer le spectacle et ses dégâts par la suite. S'il avait été là, les choses se seraient passées comme toi -
mais sans regrets.
Jamais.

La question suivante le surprend un peu.
Car en effet on ne parle plus d'amour.
C'est censé vous passer.

Les yeux ronds d'abord, ils finissent par se plisser au rythme de ses rictus.

“Pff- c'est quoi cette question ?”

Cela le fait rire.
Comme ta réaction et tes justifications.

Pourtant de nuit, sous la lumière des lampadaires, il ne peut pas bien distinguer la couleur de tes joues qui s'empourprent à la manière des amourettes de jeunesse.
Mais du coin de l'œil, il arrive à le deviner.
Simplement parce qu'il a déjà été témoin de tes agitations de cœur.
De ce même cœur que tu lui a ouvert rien qu'un peu.
Un coeur qu'il n'a pas encore complètement disséquer mais qu'il observe battre -
Il te connaît plutôt bien.

“Hmm…”

Son regard dévie ailleurs. Il avance en silence, réfléchissant sincèrement à cette situation qu'il faut maintenant imaginer.
Les secondes sont longues. Il se doute bien que tant que Leon n'a pas de réponse, plus il l'enfonce dans un supplice embarrassant.

Il t'observe de nouveau.
Te sourit de nouveau.
Iel est juste là devant lui, son intérêt du soir.

“En vrai oui ! Parce que ça voudrait dire que quelqu'un m'aime à ce point - ce serait flatteur ! En plus devant tout le monde, c’est assez gênant pour s'en souvenir pour toujours.”

Ce serait ces événements qui marquent pour toujours par cet aspect grandiose - on se croirait dans un film romantique, quand les protagonistes font leur déclaration amoureuse sous la pluie en se hurlant dans la rue à quel point ils s'aiment.
Lorsqu'il voit ce genre de scène, il retient toujours ses rires dans la salle de cinéma.
Alors ça ne le dérangerait pas que cela lui arrive en vrai - il pourrait rigoler jusqu'à ne plus en sentir ses côtes.

“Et toi ?”

Puisque visiblement on peut ressortir ces sujets enterrés,

“T'aurais aimé que je le fasse, avant ?”

Nine ouvre cette capsule normalement scellée.

Puisqu’il a décidé de rester avec Leon pour cette fin de journée, sa marche est nettement moins précipitée que tout à l’heure. Désormais le tableau ressemble simplement à une balade entre ami.e.s.
Et le sourire de Nine s'agrandit à la suite de tes rires - tu arrives toujours à prendre avec légèreté les mots qu’il crache sans filtre - c’est simple de parler avec toi. Il a tendance à l’oublier dès qu’il ne te croise plus. Alors cela lui revient tel un éclair aux premiers mots de nouveau échangés.

“C’est vrai - tu me connais bien !”

Cette situation qui n'a jamais existé - même lui il a du mal à l’imaginer vraiment.
Parce qu’il aurait fallu faire ressortir cette intensité,
qu’elle se mette à exploser devant tout le monde,
il aurait fallu t’aimer à ce point -

Nine n’en est pas sûr. Alors il se serait mis à rire fort en voyant tes joues rouges de gêne à l’idée d’être propulsé.e au devant de la scène.
Il se serait tant esclaffé, que l’hypothétique déclaration n’aurait plus de sens.

“Ça te ressemble bien aussi. De ne rien faire.”

C’est ta manière de fonctionner.
Tout en gardant ce sourire qui semble sans cesse s'excuser d’exister. Laissant ainsi les choses couler, les abandonner sans jamais t’imposer -

“Mais c’est comme ça que t’as des regrets après !”

Comme là, avec Saint et Prim,
ça te ronge jusqu'à aujourd'hui encore.

“Tu devrais faire ce que t’as vraiment envie des fois.”

Ça te changerait.
Et les autres, Nine le premier, en seraient surpris.

“Moi je crois j'aurais bien aimé que tu en sois capable.”

Avant -
Lorsqu’il a mis fin à votre relation, il aurait bien aimé que tu essaies au moins de le retenir.
Peut-être qu'il serait resté un petit peu plus longtemps - ça aurait changé quelque chose.

Si cette partie de Leon lui était révélée, Nine lae croirait probablement.
Car il y aurait des choses qui prendraient sens - comme lorsqu’iel se met en retrait parfois, avec ce sourire qui ne sait où se mettre. Ou encore lorsqu’iel rigole avec légèreté alors que le coin de ses paupières sont corrodés par les larmes. Puis par la manière dont iel sait mentir, protégeant la fragilité de son cœur -
Nine lae croirait pour sûr.
Mais Nine ne comprendrait pas.

“Non - c’est pas bizarre ou grave. Tu te prends trop la tête.”

Il ne comprendrait pas car rien ne paraît si grave à ses yeux. Rien au point pour décider une date de fin à sa vie.
Car Nine aime foncer, parfois tête baissée, parfois en regardant droit devant - peu importe - il avance sans prendre le temps de se questionner. Ainsi il en rigole. Même ses frustrations, il y pense en souriant amèrement.
Il se moque de tout.

“Il n'y a pas de règles, Leon.”

Sur comment aimer.

“Tant que t’es sûr.e de toi !”

Lui, il a les siennes - elles sont éparpillées, mal rangées et rien n’est dans l’ordre - s’il se posait une seconde il verrait qu’au milieu de toutes ces pages, il ne pourrait pas s’y retrouver !
Mais puisque rien n'est grave, il en piochera une au hasard et s'en contentera.

Et Leon l'aime comme ça.
Iel lui dit.

Nine pouffe un rire - fidèle à l’image qu’on s’imagine des déclarations (même les petites !)

“Moi aussi je t'aime !”

Depuis toujours !

Forçant le ralentissement soudain de vos pas - ses pieds ont traîné formant un petit nuage de sable sur le chemin. Ainsi, son bras passe par-dessus tes épaules et sa tête cogne doucement contre la tienne ;

“Parce qu’au contraire, t’es comme ça - t’es toi !”

Nine t’enlace, de sa manière un peu étouffante,
comme il l’a toujours fait.

"Du genre un peu maladroit.e - mais ça te rend mignon.ne."

Il s'attendrit facilement des personnes plus timides d’émotions. Cela donne envie de les serrer fort entre ses bras,
pour secouer leurs esprits tourmenté,
et remuer les cœurs meurtri.

"Puis tu rigole toujours à mes blagues, et ça c'est le plus important au final !"

Il n’a pas tant réfléchi lorsqu’il s’est mis à enlacer Leon.
Tout lui semblait naturel : dans les mots, les gestes et l’intimité -
C’était comme d'habitude,
comme toujours,
comme avant !

Il sent les bras lui glisser autour. Puis c’est au tour des mains qui se faufilent dans le dos. Et serrant fort, elles retiennent toute l'intensité qu’on peut ressentir jusque dans le bout des doigts.

Cela lui arrache un énième sourire, ne cessant d’accroître sur ses joues.
Puis à défaut de pouvoir observer tes expressions pleines de sincérité, Nine renforce son étreinte, lovant son visage au creux de ta nuque. Ainsi il peut sentir ta peau brûlante d’ivresse affective contre sa joue. Il peut aussi entendre l’écho de ton cœur tambouriner contre son torse. Et ton parfum lui propage ces moments passés ensemble.

Nine à toujours beaucoup apprécié Leon. Il ne sait pas à quel point, mais assez pour rester dans ses bras, et écouter toutes ses confessions.
En tout cas ce soir, c’est ce qu’il se dit.
(Ignorant aussi tous ces moments où il est parti te laissant seul.e.)

En réponse à tes mots, les épaules de Nine tremblent au rythme de ses rictus.

“... C’est bien solennel d’un coup.”

Il se demande quelle tête tu aurais pu faire en lui avouant tout ça.
Est-ce que tes joues sont rouges jusqu’aux oreilles ?
Est-ce que ton sourire se fend pour imiter la lune au-dessus ?
Et tes yeux, sont-ils emplis de larmes, les rendant aussi pétillants qu’un ciel étoilé ?

Il devinera peut-être après.
Pour le moment, il ne compte pas te lâcher tant que tu ne tenteras pas de reculer.

“Je t’en ai jamais, jamais, voulu - je sais pas pourquoi tu te mets tout ça dans la tête.”

(Simplement lassé.
Mais il est toujours revenu !)

“Je suis content aussi qu’on soit ami.e.s. En plus ça fait longtemps que tu me supportes ! Rien que pour ça, t’es plus fort.e que les autres.”

Même lorsqu’il était cruel avec toi -
ça le fascine presque de te voir encore ici avec lui.

Tes accusations le font simplement rire sans démentir.
Peut-être que tu as raison - c’est de sa faute, c’est lui qui a commencé, et il a rendu cette soirée plus spéciale que les autres. Après tout, les sentiments de Leon ont toujours été simples à ébranler. Et Nine s'en amuse chaque fois.

Il n'a jamais arrêté - lorsqu'il rigole fort exprès pour que tu l'entende plus loin, avant de revenir partager les histoires et sourires ensemble.
Ou lorsqu'il joue avec les mots, et met l'accent sur ce qui fait terriblement mal, ou au contraire d'une tendresse presque surprenante.
Et lorsqu'il déborde d'affection en te prenant constamment dans ses bras, te serrant fort pour faire ressortir ce flou intense, pour ensuite disparaître plusieurs jours comme s'il t'évitait.

Et toi, malgré tout cela,
le regard plein d'admiration,
tu l'as toujours suivi.

“T’es trop gentil.le.”

Pour l’avoir pardonné tant de fois.
Et d’avoir succombé aux horreurs.

Au travers de tes yeux, Nine semble bien plus chaleureux que terriblement brûlant - au point que cela en devient asphyxiant pour les autres.
Mais les compliments font plaisir à tout le monde ! Et plus que ça encore, l’accumulation de tous ces aveux prononcés cœur ouvert, comble quelque chose en lui. Cela fait naître ce sentiment de grandeur, d’une importance qui lui appartient, une place ici avec toi - spécialement pour lui !
Alors avec ces déclarations, il ne peut même pas feindre l’indifférence.
Lui non plus ne lâche toujours pas. Et son étreinte ne cesse de t’étrangler doucement.

“Non mais même les lits du rez-de chaussé, c'est du luxe a côté de ce qu’on a !”

Il annonce en se redressant. Puis en se reculant légèrement, ses bras se sont dénoués pour se poser sur tes épaules. Nine est à peine plus grand que Leon alors il n’a pas besoin de se baisser pour que vos visages soient en face de l’autre.
Il est toujours souriant.

“Je veux bien du coup.”

Il accepte avec plaisir.
Et la réflexion devient jumelle par ce passif commun qui n’avait pas été déterré jusqu’à ce soir - cela fait longtemps qu’il ne t’as pas vu endormi à ses côtés.

“On devrait y aller - avant qu’un parent arrive !”

Parce qu’il se fait tard, et que les rondes ont déjà commencé pour interdire la nuit aux plus jeunes.

Finalement c’est Nine le premier qui rompt l’intimité, te quittant totalement, laissant ainsi de nouveau l’espace respirer entre vous. Et il ne recoiffe que vulgairement les mèches qui lui sont tombées devant les yeux.

“On court ? Jusqu’au dortoir.”

Il a encore plein d’énergie à dépenser - d’autant plus après toutes ces émotions passionnelles !