amazed

les pieds nus foulent l’herbe tassés par les pompes, les mains dans les poches ;
il siffle, un son rond qui monte et descend sur les arpèges,
c’est un son mélodieux pour tromper l’ennui alors que tous les bavardages s’emmêlent avec les bruits de déglutition. lui, il a tellement mangé, que s’il essaye encore, il va vomir et alors ce sera gâché. parfois il tire une goulée sur sa flasque et s’ébroue tout entier à cause de l’alcool tourbé.

Faïr a perdu Le Chat. il n’a prévu de cherché personne. pourtant il sait qu’il va trouver quelqu’un. il n’est pas inquiet du laps de solitude où ses idées, un papillon qui nage et la couleur indigo du ciel, baignent sans continuité.

il te trouve jolie avant de te reconnaître. il sait sans le savoir que c’est ce qu’il a pensé la première fois qu’on a installé ta tignasse brune et revêche à côté de la sienne dans le coin réservé aux cancres.

olala… mais c’est Kiki !! la plus fraîche des fermières !! comment on a trop de la chance de la voir en vrai !! il prend une voix de crécelle, les mains en porte-voix autour de sa bouche, et marche à petit pas rapide dans le dédale humain qui vous sépare. il espère que toi aussi tu marches vers lui. quand il te trouve, il t’enlace comme si ça faisait des années, ça fait sans doute quelques heures, quelques jours, mais le temps laisse la même empreinte sur Faïr. le menton derrière tes épaules, et le dos vouté pour te tenir proche, il inspire ton parfum de terre retournée et la parfum bon marché qui flotte. tu viens d’arriver ? tu es venue avec Aura ? elle joue ce soir non ? on peut aller lui cueillir des fleurs peut-être, ensemble, pour lui donner quand tout sera terminé ? il se détache, tout sourire. qui d’autre après tout.

il rit avec le nez, trompette qui tressaille, aux exclamations simplifiées, consécutives et habillées de mimes. il y a le vent dans son dos qui le fait frissonner, la cloque humide du t-shirt sur ses épaules, la manière dont ses sourcils se courbent avec gaité et le soupçon du curiosité. il aimerait que tu ne partes pas trop tôt. il ne sait plus qui est nine mais il peut bien attendre pour faire honneur à la chance qu’il a de te croiser. lui, il n’était pas prévu, mais c’est meilleur ainsi, non, kiki ? te demander de rester lui coûterait un effort qu’il se sent incapable de fournir. il préfère caler ses doigts, encore fripés par la baignade, en haut de tes crins noir corbeau pour en faire tomber quelques idées malignes.

« c’est vrai que se prendre une grosse fleur pourrie en pleine tête, la loose. bah non je l’ai pas vue, fin j’crois pas, j’te demanderai pas en tout cas ! peut-être que si. il paraît qu’elle va avoir une robe trop belle. on va voir que elle. même si elle fait genre… un arbre. ou une fleur ? ou… enfin bref. t’as capté. » méditatif, faïr gronde un rire, il a passe son bras à l’intérieur du tien pour te faire marché à travers le banquet par-dessus — et malheureusement parfois sûr — les belles godasses cirées du monde. il cherche des fleurs ailleurs que sur le motif liberty des habits champêtres. « pourquoi même t’as un truc prévu ? tu vas… » ses yeux font un rapide tour du paysage bondé, et c’est un geste inutile pour alarmer sur le caractère illégal de son sous-entendu, parce qu’il n’a pas l’esprit pour y penser, il se complète lui mémo en mimant une longue taffe entre l’index et le majeur. « tu devrais peut-être m’emmener. si c’est avant le théatre. je peux faire plein de truc. genre le guet. ou l’appât. ou l’idiot. » tout à tout, il essaye un visière sur le plat de sa main, un crochet de l’index et un sourire aussi inquisiteur qu’embarrassant.