amazed

Alors même qu'il se trouve dans son dos, Ziggy porte un doigt à ses lèvres. Sa poitrine se soulève, sa respiration est erratique. Il aimerait aller lui parler mais n'en trouve pas le courage. Il préfère observer de loin, et s'assurer que sa soirée se passe sans encombres. Ziggy plantera la première épine dans les pieds de ses ennemis - leur arrachera la langue à la moindre moquerie. Il ne tolère pas que des souillures osent croire avoir la permission de dire tout haut des vérités qui ne leur appartiennent pas. Oui, Felix est décevant - c'est une réalité bien embêtante. Mais qui sont-ils pour se permettre de lui rappeler ? C'est un droit que se réserve Ziggy dans l'apostasie du silence.

Ah ! Felix les a entendu ! Il s'éloigne de la foule méchante et vile pour se reclure dans la forêt. Le cœur de Ziggy saigne avec lui. Il le suit, naturellement - se dissimule dans les ombres des arbres et de la nuit naissante. Au loin, l'on entend la cacophonie de la musique et les lumières installées par des membres de sa maison. C'est joli, certes, mais Ziggy préfère l'esthétique humaine - les corps qui se froissent, qui se cassent. Il sursaute en entendant le bruit singulier du poing qui frappe. Il se cache derrière le tronc d'un épicéa et guette le sans-étoile maltraiter le sien.

S'il n'a pas vraiment de réelle peine pour lui ; sa frustration l'atteint et le chagrine. Qu'est-ce qu'il pourrait bien faire pour l'aider ? Hormis punir et châtier ceux qui l'ont mis dans cet état. Ziggy songe à de pires sévices que ce qu'il a pu prodiguer jusqu'à maintenant. Ce n'est pas suffisant.

Ah !

Il baisse les yeux, une bûche vient de heurter l'arbre derrière lequel il se terre - le faisant s'éloigner par réflexe, et donc sortir de sa cachette. Face à Felix, il lève un regard orageux - fixe, dérangé.

Je ne t'ai pas suivi.

Il se justifie et invente une excuse - la plus probable.

Je voulais faire pipi et je t'ai surpris.

Lui-même songe à l'absurdité de ce propos. Pourquoi ne pas directement aller aux toilettes du bâtiment le plus proche ? Ils ne sont pas si loin. Ziggy cherche à deviner si Felix le croit et avance d'un pas.

Qu'est-ce que tu fais ici ?

Tout seul ;
à la merci des vautours contre lesquels je ne pourrais pas toujours te protéger.

Voilà. C'est bien. C'est parfait, même. Regarde Felix... Toi aussi tu apprends à faire semblant. Et dans ton petit rôle, tu es drôlement convaincant.
Ziggy écarquille les yeux. Il se surprend à sourire, enjoué par le dynamisme de Felix face à ses petites déviances. Il rêve, l'espace d'un instant, de lui montrer d'autres choses - de l'instruire à l'imagerie de la monstruosité ; de le séduire par ces biais ; de le tremper dans un lac de sang, si seulement il en existait un aux portes de l'enfer. Ziggy veut partager sa souffrance, celle qui coule dans ses veines ; et à quel point elle est addictive - autant qu'elle est vaine.

Tu es un bon menteur...

Qu'il souffle alors que leurs corps s'épousent encore. Ziggy a des tics au niveau du visage. Quand il se retient de rire, le creux de sa fossette tressaute.

Aaaah... Oui, je vois-

Il n'est pas le premier à se réjouir de ce spectacle ;
les hommes se complaisent dans la cruauté, et certain-es ici l'assument sans gravité. Mais Felix a les yeux qui pétillent comme ceux d'un enfant à qui l'on aurait fait une surprise.

Ziggy n'arrive pas à réprimer le sourire mauvais qui habille son plaisir ; celui qu'il ressent vivement grouiller dans ses entrailles en voyant les ennemis de Felix tomber. Il aimerait parfois que l'Enclave tolère la violence plutôt que de seulement l'encourager. S'ils ne se font pas prendre, quel est bien l'intérêt ?

((Il ignore que Sohan surveille chacun de ses faits et gestes))

Le baiser le surprend. Ce n'est pas que ça le dégoûte, mais Ziggy a en horreur de ne pas être en contrôle sur chacun des pans de son existence. Mais comme ce sont les lèvres de Felix qui effleurent sa peau - il ignore ce problème, et l'érige en déité sur son autel.

Tu es heureux...?

Ziggy attrape le visage de Felix dans ses mains.

Je suis heureux si tu es heureux.

Il enfonce ses ongles dans sa chair ; y laisse des marques sans contrôler sa force.

Copain...

C'est plus fort que lui, il l'obsède jusqu'au bout de la nuit.

Copain. Ziggy pourrait bien se lasser de cette appellation. A force de l'entendre de sa bouche et de la sienne, il croit que ça ne lui plaît plus tellement. Il ne s'est jamais caché d'être avide et obsessionnel (ou peut-être que si, justement - les autres n'en ont pas idée) et il voudrait être tellement plus que ça. Il mérite, à son sens, d'être plus que ça !

Tout ce qui compte pour le moment, c'est que Felix a l'air content de lui. Ainsi, il s'imagine resserrer son emprise sur lui. Il fera de ce rebut de l'Enclave un diamant brut qui brillera plus fort que mille étoiles.

Un peu rude d'assumer que je n'ai rien de prévu.

Il arque un sourcil et le toise un instant, avant de pouffer d'un rire loufoque et décalé.

Haha ! On fait ce que tu veux.

Il se laisse entraîner vers le buffet. Alors qu'il le regarde de biais, en arrière, Ziggy remarque que les yeux de Felix sont ceux de quelqu'un qui cherche désespéramment une présence dans la foule. Ziggy serre les dents et nourris en silence une jalousie sourde et une possessivité déplacée. Pourquoi est-ce que Felix ose s'attarder sur un-e autre alors qu'il est là, disposé et disponible ?

Tu veux faire quoi ?

Il essaie d'attirer son attention. Ziggy refrène les questions passives-agressives qui pourraient filer d'entre ses lèves à toute vitesse.

Tu cherches quelqu'un ?

Oh.
C'est sorti tout seul.
Je ne te suffis pas ? reste aux portes de son cerveau, frappant les parois comme un animal sauvage.

Tu as l'air ailleurs.

Il lâche sa main pour croiser les siennes dans son dos. Il recule d'un pas, pour mieux le détailler.

J'aime pas qu'on se foute de ma gueule.